Point mensuel de mai 2025 - Investissements

06/06/2025 - 20 min de lecture

Thématiques de l'article hashtagDécryptage

tout un mag pour vous

Point mensuel de mai 2025 - Investissements

Après un mois d’avril d’extrême tension marqué par les nombreux rebondissements dans la guerre commerciale et par l’escalade vertigineuse entre Washington et Pékin, les principales places boursières ont prolongé en mai le rebond impressionnant entamé courant avril. Bien évidemment, les investisseurs ont été extrêmement soulagés par la trêve intervenue entre les États-Unis et la Chine, les deux mastodontes de l’économie mondiale. Cette pause cruciale de quatre-vingt-dix jours annoncée le 9 avril par le président Trump ainsi que les négociations en cours avec de nombreux pays dont naturellement l’Union européenne, ont permis de prolonger cette belle reprise des marchés d’actions. Mais la question centrale depuis des semaines des droits de douane n’a pas été la seule à nourrir cette dynamique haussière. Les bonnes publications des résultats du premier trimestre 2025 des entreprises américaines et européennes, la bonne tenue de l’économie américaine (baisse de l’inflation et résilience du marché de l’emploi) en avril ainsi que la baisse des prix du pétrole ont logiquement retenu l’attention des investisseurs et contribué aux excellentes performances des grands indices actions qui ont tous effacé les pertes liées au séisme boursier du mois d’avril.

Après avoir été la place boursière la plus lourdement touchée depuis le mois de février, Wall-Street enregistre la meilleure performance du mois de mai avec un indice Standard & Poor’s 500 qui bondit de 6,15 %. Il est suivi de près par les actions internationales et le Japon dont les indices MSCI World et Nikkei 225 progressent respectivement de 5,69 % et 5,33 % tandis que l’Europe et les Émergents font jeu égal avec une performance identique de 4 % pour leur indice Euro Stoxx 50 et MSCI Emerging Markets. Enfin, nos portefeuilles progressent ce mois-ci de 4,9 %.

perfs globales
Graphe

Comme chaque mois, voici le tableau des performances des investissements que nous conseillons : nous avons investi 100 000 euros sur chaque portefeuille type au 31 Décembre 2011, et nous donnons donc la performance du portefeuille et de chaque ligne pour les supports PEA et assurance-vie (Floriane, Espace Liberté et Anaé) au 30/05/2025.

 

Portefeuille type PEA* : valorisation : 284 445 €

perfs pea

 

 

Portefeuille type Assurance-vie* (Floriane, Espace Liberté 1 & 2 et Anaé) : valorisation : 250 281 €

perfs ass vie

* Allocation réservée aux clients de la Gestion Conseillée

 

Répartition du portefeuille actuel : 

répartition

 

Point marchés

Après avoir considérablement souffert des annonces tonitruantes et contradictoires du président américain durant le mois d’avril, les marchés ont été visiblement rassurés par les premiers accords concernant la guerre commerciale engagée par D. Trump. Un mois après les premiers signes de détente qui avaient suivi le déclenchement des hostilités, l’ambiance a radicalement changé sur les marchés. Les investisseurs semblent décidés à voir le verre à moitié plein plutôt qu’à moitié vide. Ils espèrent que la pause de quatre-vingt-dix jours sur les taxes douanières réciproques accordée par Washington début avril à la plupart de ses partenaires commerciaux, permettra de parvenir à de nombreux accords bilatéraux. Ils restent cependant sur leurs gardes car après la forte correction intervenue entre la deuxième moitié du mois de mars et la mi-avril, les opérateurs de marché guettaient la moindre éclaircie pour revenir sur les marchés actions. Ces derniers ont profité de la trêve annoncée le 9 avril par D. Trump pour se mettre en quête de bonnes affaires. Pour preuve, entre la mi-avril et la mi-mai, l’indice parisien CAC 40 a d’ailleurs grimpé d’environ 9,5 % et aux États-Unis, le Nasdaq s’est envolé de plus de 13 %.
Ainsi, les premiers accords commerciaux ont-ils permis de rassurer les marchés. Celui intervenu avec le Royaume-Uni, partenaire historiquement proche des États-Unis était largement attendu et prévisible. Les négociations promettent d’être bien plus ardues avec l’UE mais surtout avec la Chine qui a fait preuve d’une absolue détermination depuis l’ouverture des hostilités. La route risque d’être encore longue avant que nous parvenions à un accord formel entre les États-Unis et la Chine, puis entre les États-Unis et l’Europe. D’ailleurs, une détérioration dans le processus des discussions reste toujours possible comme en témoignent les derniers revirements de D. Trump fin mai.

Bien que les négociations sur les droits de douane soient laborieuses, le simple fait qu’il y ait des discussions entre Etats suffit à rassurer les marchés financiers qui font de la recherche d’une issue à cette guerre commerciale le sujet majeur à la reprise durable des indices boursiers. Mais cette question primordiale n’a pas été la seule à avoir permis aux marchés actions de retrouver de belles couleurs au mois de mai. Le retour d’un certain optimisme auprès des investisseurs a également été favorisé par les bonnes publications des résultats des entreprises au premier trimestre 2025, la bonne tenue de l’économie américaine au mois d’avril ainsi que par la baisse des prix du pétrole. Mais revenons à présent sur ces principaux facteurs de soutien qui ont permis aux places boursières d’effacer de leur mémoire le cauchemar du mois d’avril.

1.    Les négociations sur les droits de douane

Entre les États-Unis et le Royaume-Uni : le tout premier accord conclu par l’Administration Trump pour enrayer la guerre commerciale engagée par le président américain avec le reste du monde a été signé le 8 mai avec le Royaume-Uni, l’un des rares pays que D. Trump considère plutôt comme un allié. Cet accord surtout « politique », n’est pourtant pas très engageant même si le tarif de base de 10 % est toujours le quadruple du taux moyen précédent. Il donne cependant des informations sur les prochaines négociations avec d’autres pays qui s’appuieront probablement sur un droit de douane minimal de 10 %. Il montre surtout que les Anglais, pour lesquels une relation privilégiée avec les Américains compte davantage qu’avec les Européens ont été malins en se montrant les premiers prêts à un rapprochement avec les États-Unis.

Entre les États-Unis et la Chine : le week-end du 10 et 11 mai, Pékin et Washington ont annoncé une pause de quatre-vingt-dix jours sur les droits de douane qui avaient atteint 145 % pour les produits chinois et 125 % pour les produits américains après la folle escalade entre les deux Etats depuis le 2 avril dernier. Les deux superpuissances mondiales ont enterré provisoirement la hache de guerre commerciale en suspendant temporairement la majeure partie des droits de douane prohibitifs qu’ils s’étaient mutuellement imposés. À l’issue de deux jours de négociations à Genève, chacun des deux camps a accepté de gommer 115 points de surtaxe ce qui a permis de ramener momentanément les droits de douane sur les produits chinois importés par les États-Unis à 30 %, et les droits de douane sur les produits américains importés par la Chine à 10 %.
La réduction des barrières douanières instaurées ces dernières semaines va évidemment dans le sens de l’intérêt commun des deux pays car elles avaient de facto mis en place un véritable embargo sur les échanges entre les deux économies. Il s’agit là d’un signe important d’apaisement dans la guerre commerciale qui a secoué les marchés financiers et alimenté des craintes d’inflation et de ralentissement économique aux États-Unis, en Chine et dans le reste du monde. Les deux camps prévoient de travailler à un accord encore plus étoffé sur les barrières non tarifaires qui empêchent notamment les entreprises américaines de prospérer en Chine et qui concernent le plus souvent les licences ou les quotas d’importation. Washington et Pékin ont également prévu de travailler sur la question du fentanyl, un puissant opioïde de synthèse qui fait des ravages aux États-Unis. Les discussions à venir devraient porter sur l’entrée du bœuf, du soja et autres produits agricoles américains en Chine en contrepartie de l’accès à des produits clés comme les logiciels, les produits chimiques ou les équipements aéronautiques américains, alors que D. Trump reste obnubilé par le déficit commercial avec Pékin qui a atteint 300 milliards de dollars en 2024. Pékin en revanche, ne devrait pas rétropédaler sur les restrictions aux exportations de terres rares ou minerais critiques étant donné que la Chine en a besoin pour sa propre économie.
Mais jusqu’à la signature d’un accord final entre ces deux colosses, la tendance générale des marchés restera volatile et incertaine car nous savons très bien qu’à tout moment, D. Trump est capable d’une nouvelle saute d’humeur comme le 2 juin sur son réseau Truth Social lorsque, sans donner de détail, il s’en prend à nouveau à la Chine en mettant en avant le fait « qu’elle aurait totalement violé » l’accord récemment conclu avec les Etats-Unis en vue de réduire mutuellement les tarifs douaniers et les restrictions à l’exportation sur les minerais critiques. Cette nouvelle charge de D. Trump vis-à-vis de Pékin se produit au moment où sa stratégie tarifaire subit un revers majeur (cf. « La politique des droits de douane de Donald Trump contrariée par la justice américaine ») et sans doute aussi en réaction à l’éditorial du Financial Times qui l’a taxé « de roi de la dégonfle » en raison de ses annonces de droits de taxe exorbitants, suivies de pauses puis de nouvelles annonces.
En résumé, les négociations commerciales entre les États-Unis et la Chine avancent même si elles sont actuellement un peu au point mort en attendant l’implication directe des deux présidents pour parvenir à un accord. Dans ce contexte de regain de tensions commerciales, les marchés boursiers ont d’abord commencé par reculer avant de se reprendre en cours de journée après que le président américain s’est montré ouvert au dialogue avec son homologue chinois, pour terminer en fin de journée en territoire négatif après de nouvelles déclarations au sujet d’une hausse potentielle des droits de douane sur les importations d’acier et d’aluminium de 25 % actuellement à 50 % à compter du 4 juin.

Entre les États-Unis et l’Union Européenne : le 26 mai, les indices européens étaient bien orientés dans le sillage de la prolongation des négociations commerciales entre l’UE et les Etats-Unis. A la suite d’un appel téléphonique entre D. Trump et Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission européenne aurait montré sa volonté d’entamer des négociations sérieuses. Le président américain a ainsi repoussé la mise en place des surtaxes douanières de 50 % sur les produits importés de l’UE au 9 juillet.

2.     Les bonnes publications des résultats des entreprises au premier trimestre 2025

La quasi-totalité des sociétés ont publié leurs chiffres trimestriels, 55 % des sociétés européennes ont battu les attentes contre 64 % des sociétés américaines. Par secteur, les services aux collectivités, la finance et la santé se sont démarqués avec des résultats globalement supérieurs au consensus. Nous notons toutefois que les attentes avaient été particulièrement réduites pour ces secteurs, après plusieurs trimestres difficiles sur le plan opérationnel. A l’inverse, les secteurs de la tech, de l’énergie, de la consommation de base et des télécoms ont fait partie des maillons faibles de cette saison de résultats. Au-delà des chiffres, nous nous sommes surtout intéressés aux discours des managements quant à la situation macroéconomique et aux précisions concernant l’impact des tarifs douaniers sur leurs résultats. Un grand nombre d’entreprises n'ont pas été en mesure de fournir des indications à ce sujet, certaines ont même suspendu leurs objectifs (Stellantis, Mercedes-Benz etc.), tandis que d’autres ont préféré adopter une approche très prudente en réduisant leurs cibles (Porsche, BIC, Dassault Systèmes etc.).
En fin de mois, l’attentisme restait de mise en attendant la publication des résultats du 1er trimestre 2025 de Nvidia le 29 mai. Le géant de la tech a finalement dépassé les attentes, tout en rassurant sur ses perspectives du 2e trimestre 2025. Malgré un ralentissement de la demande en Chine, la demande reste soutenue dans l’IA et les solutions pour les datacenters. De plus, le groupe a annoncé qu’il préparait une puce IA à moindre coût à destination de la Chine, avec une production de masse attendue dès juin. Le marché a salué cette bonne publication par une hausse de 5 % du titre.
D’une façon générale, l’incertitude devrait rester assez forte car les taxes douanières américaines en place depuis début avril et les négociations en cours ne seront pas sans conséquence sur la croissance économique mondiale et les résultats des entreprises. Pour preuve, de nombreuses sociétés américaines (Walmart, Procter & Gamble, Colgate-Palmolive Company, Mattel, Black & Decker etc.) ont annoncé des surcoûts significatifs en raison des tarifs douaniers et certaines, à l’image du constructeur automobile Ford, ont même renoncé à afficher des prévisions pour les prochains mois, tant l’incertitude reste forte. Pour les analystes, le véritable test pour les marchés interviendra à la fin du premier semestre, lorsque la trêve accordée par Washington expirera et que les effets de la taxe plancher à 10 % en place depuis début avril à l’entrée des États-Unis se feront sentir.

3.     La bonne tenue de l’économie américaine

Le mois a été calme sur le front macroéconomique en Europe. Les investisseurs ont surtout eu les yeux rivés vers les Etats-Unis, avec la publication de plusieurs indicateurs majeurs, dont l’indice des prix à la consommation (IPC) et à la production (IPP) en avril. Les données ont été encourageantes, puisqu'elles n’ont pas révélé de hausse des prix en lien à la politique commerciale de D. Trump.
L’inflation (IPC) a progressé en avril de 2,3 % en rythme annualisé aux Etats-Unis, soit une légère décélération par rapport à mars (2,4 %). Cette donnée a surpris le marché puisque le consensus s’attendait à une stabilisation des prix. En regardant de plus près, le ralentissement de l’inflation a été principalement dû à une base de comparaison favorable sur les prix de l’énergie (- 3,7 % sur un an). De même, l’indicateur IPP a aussi surpris puisqu’il est ressorti à 2,4 % en rythme annualisé en avril contre 2,7 % en mars et 2,5 % pour le consensus.
Ces données suggèrent que l’augmentation des coûts engendrée par les tarifs douaniers a été absorbée par les entreprises en avril. La hausse des droits de douane devrait sans doute prendre du temps à se matérialiser, à mesure que les entreprises mettent en place des mesures correctives, comme des hausses de prix. Les prochaines publications de l’inflation seront essentielles pour confirmer cette idée. En attendant, le marché table de plus en plus sur une reprise de l’assouplissement monétaire de la Fed à partir de septembre.

4.     La baisse du pétrole

Le 3 mai, l’OPEP+ a surpris une nouvelle fois le marché en annonçant une hausse de sa production de 0,4 mb/j en juin (400 000 barils par jour), soit un niveau supérieur au plan initial qui prévoyait une hausse de 0,1 mb/j (100 000 barils par jour). Comme au mois de mai, le cartel pétrolier a accéléré le relèvement de sa production. Cette décision marque, selon nous, un bras de fer au sein de l’organisation qui pourrait dégénérer en guerre des prix lors de la réunion de juin. L’Arabie saoudite pourrait en effet chercher à sanctionner les membres indisciplinés du cartel qui ont cherché à gagner des parts de marché en augmentant leur production de brut à l’image du Kazakhstan qui a produit 0,3 mb/j de plus que ses quotas, des Émirats arabes unis (+ 0,3 mb/j) ou de l’Irak (+ 0,4 mb/j). Le Kazakhstan a d’ailleurs récemment affirmé qu’il définirait désormais sa politique de production selon ses intérêts nationaux, et non ceux de l’OPEP+. Ce contexte fragilise l’unité du cartel et pourrait conduire à terme certains pays à le quitter.
Si le cartel décidait de lever l’ensemble des réductions volontaires restantes, le prix du baril de Brent pourrait tomber à 50 voire 40 dollars d’ici la fin de l’année. En effet, le marché pétrolier se retrouverait alors en situation de surabondance d’environ 3 mb/j au second semestre 2025 ce qui accentuerait un peu plus le déséquilibre actuel entre l’offre et de demande en raison du net ralentissement de la demande mondiale (en particulier de la Chine) en 2025-2026 et de la baisse de la production du Venezuela sous l’effet des sanctions américaines. Nous retenons l’hypothèse prudente d’une hausse de la production très graduelle de l’OPEP+ à partir de juillet avec une disparition complète des quotas d’ici septembre 2026. A l’arrivée, la baisse du pétrole en mai aura contribué à faire diminuer le prix du carburant et de fait, à améliorer le pouvoir d’achat des consommateurs, notamment américains.

Au mois de mai, les places boursières ont donc nettement rebondi après les fortes turbulences du mois d’avril. Bien que la visibilité concernant la politique commerciale américaine soit encore imparfaite, les investisseurs ont tout de même retrouvé le goût du risque en profitant de points d’entrée favorables sur les différents indices mondiaux. Après avoir été particulièrement malmenés pendant des semaines, les États-Unis enregistrent la meilleure performance. A Wall-Street, le Nasdaq s’envole de 9,56 % tandis que ses voisins Standard & Poor’s 500 et Dow Jones grimpent respectivement de 6,15 % et 3,94 %. Les indices MSCI Emerging Markets (pays émergents) et Euro Stoxx 50 (zone euro) ne parviennent pas à se départager et enregistrent tous les deux une belle hausse de 4 %. En ce qui concerne la zone euro, c’est toujours le grand écart. La bourse de Francfort enregistre de loin la meilleure performance du mois et voit son indice Dax progresser de 9,56 % grâce aux secteurs des logiciels, de la défense et des banques). En comparaison, l’indice parisien CAC 40 monte de seulement 2,08 % toujours pénalisé par un secteur du luxe en panne à cause de la Chine et des Etats-Unis.

drapeaux

Depuis le début de l’année, les indices actions enregistrent toujours des écarts de performances considérables. Les places boursières du Vieux Continent continuent de faire nettement la course en tête. Ainsi, l’Euro Stoxx 50 progresse de 9,61 % tandis qu’au niveau des indices nationaux, le marché allemand devient inarrêtable avec un Dax qui culmine à + 20,53 % quand le marché français voit son indice tricolore CAC 40 en hausse de 5,03 % toujours fortement pénalisé par le poids du secteur du luxe. Les Émergents sont loin de démériter avec un indice MSCI Emerging Markets qui progresse de 7,61 % et qui profite des bonnes performances de la bourse chinoise. Les actions internationales pénalisées par le poids des Etats-Unis dans l’indice MSCI World (près de 70 %) ne s’en sortent pas si mal à + 4,2 %.
Outre-Atlantique, c’est évidemment toujours compliqué à cause des droits de douane qui font craindre une reprise de l’inflation voire une possible récession aux Etats-Unis. Cependant, le retour des investisseurs permet aux indices américains de revenir proche de l’équilibre. Le Standard & Poor’s 500 (indice de référence des investisseurs) revient enfin en territoire positif à + 0,73 %. Le Dow Jones (plus vieil indice mondial) et le Nasdaq 100 (indice des valeurs de la tech américaine) ne devraient plus tarder à revenir dans le vert. Ils terminent respectivement à - 0,64 % et - 1,02 %. Enfin, l’indice japonais Nikkei 225 ferme toujours la marche avec perte de 4,84 %.

Sur le marché des taux, les obligations ont continué de subir une certaine volatilité au cours du mois de mai. Le rendement du bon du trésor américain à 10 ans s’est tendu en passant de 4,167 % fin avril à 4,397 % fin mai (+ 5,52 %). Le Bund allemand à 10 ans a fait de même en passant de 2,440 % fin avril à 2,508 % fin mai (+ 2,79 %). En revanche, l’OAT française à 10 ans est resté stable à 3,164 % fin mai contre 3,165 % fin avril (- 0,03 %). Depuis le début de l’année, l’obligation américaine à 10 ans est passée de 4,572 % fin décembre à 4,397 % fin mai (- 3,83 %). Le taux de l’OAT française à 10 ans est passé de 3,194 % fin décembre à 3,164 % fin mai (- 0,94 %) tandis que le Bund 10 ans reste en territoire positif à 2,508 % fin mai contre 2,362 % fin décembre (+ 6,18 %).

Sur le marché des matières premières, l’or est resté très stable ce mois-ci à 3 315 dollars l’once contre 3 319 dollars fin avril (- 0,11 %). Il reste toujours très haut (+ 25,54 % depuis le 1er janvier) et finalement assez proche de son sommet de 3 419 dollars l’once (en clôture) atteint le 22 avril dernier soit en baisse de seulement 3 % par rapport à son pic. Il faut dire que le contexte de ralentissement économique, les incertitudes autour de la politique économique de D. Trump et la situation géopolitique toujours très tendue ne risquent pas de lui faire perdre un statut de valeur refuge qui continuera de renforcer l’intérêt des nombreux investisseurs. (Cf. Point mensuel de mars : « L’or franchit pour la première fois la barre symbolique des 3 000 dollars »).

Du côté du pétrole, après l’effondrement du mois d’avril (- 15,58 %) dû principalement à la décision de l’OPEP+ d’augmenter plus rapidement que prévu sa production de pétrole et à la question des droits de douane, le cours du Brent de la mer du Nord (référence des investisseurs) est resté stable ce mois-ci à 62,78 dollars contre 63,12 dollars fin avril (- 0,54 %). Il se situait à 74,64 dollars le baril fin décembre ce qui représente une baisse de 15,89 % pour l’année en cours. Les divergences au sein de l’OPEP+ ainsi que les tensions commerciales risquent de continuer à peser sur les perspectives de croissance de la demande de pétrole et prolonger sa chute d’ici à la fin de l’année. Nous révisons à la baisse notre estimation d’un cours du Brent à 60 dollars en moyenne en 2025 (vs 65 précédemment) et proche de 50 dollars à partir de 2026.

chiffres_cles


Convictions

Avant toute chose, précisons que l’ensemble des convictions développées le mois dernier sont évidemment toujours d’actualité, aussi, afin de ne pas me répéter et de ne pas vous lasser, je renvoie volontiers le lecteur vers le paragraphe « Convictions » du point mensuel d’avril. Ceci étant dit, que pouvons-nous ajouter alors qu’il faut se rendre à l’évidence, personne n’est aujourd’hui en mesure de prédire quelles seront les prochaines lubies trumpiennes, à quel moment s’arrêtera cette guerre commerciale, quel en sera le dénouement final et encore moins, quels seront les possibles dégâts causés.

Depuis le début du second mandat de D. Trump et particulièrement depuis le début de cette folle offensive commerciale, les marchés financiers peinent à évaluer à court et à long terme les impacts économiques des nouveaux droits de douane tant pour les Etats-Unis que pour le reste du monde. La volatilité des marchés boursiers, obligataires et des devises a fortement augmenté, tout comme le niveau d'incertitude des politiques économiques américaines et mondiales.
Nous avons tout de même des raisons objectives de rester confiants car nous pensons que le rebond des marchés actions a encore du potentiel. Les actions américaines qui traditionnellement tirent les autres places boursières mondiales ont continué de se redresser portées par des publications macroéconomiques et des résultats d’entreprises rassurants. Malgré les effets négatifs de l’incertitude commerciale sur les droits de douane, qui poussent certains observateurs à redouter une possible récession fin 2025, nous restons optimistes même si un ralentissement de la croissance américaine est probable. Les consommateurs ont avancé leurs dépenses et pourraient les réduire lorsque les droits de douane se répercuteront pleinement. Mais l’impact pourrait être moins sévère que ne le craint le consensus, à condition toutefois que l’Administration Trump continue de rassurer les marchés en signant des accords commerciaux avec ses partenaires à mesure que nous nous rapprocherons de la date butoir du 9 juillet prochain (terme des quatre-vingt-dix jours). Pour le moment, bien que le choc tarifaire commence un peu à se faire sentir, son effet sur les prix à la consommation reste pour l’instant très limité. Les données indiquent que l’économie américaine a résisté jusqu’ici à la hausse des tarifs et à l’incertitude accrue. Après des volumes de consommation très soutenus en mars, en lien avec les hausses de prix futures causées par les tarifs douaniers, les ventes au détail ont été faibles en avril mais n’ont pas chuté ce qui est rassurant au même titre que le marché du travail américain qui jusqu’ici, n’a montré aucun signe d’affaiblissement marqué. Dans ce contexte incertain, nous pouvons malgré tout identifier quelques évènements qui ont de bonnes chances de se réaliser :
    ✔    Un apaisement dans la guerre commerciale, ce qui permet de rester investi sereinement sur les actions européennes et américaines. Certes, ces dernières ont sous performé en début d’année, mais la saison des résultats s’est révélée rassurante (croissance des bénéfices par action du S&P 500 de 13,6 % au 1er trimestre 2025). À moyen terme, le potentiel reste limité par la valorisation élevée mais des révisions haussières des bénéfices sont toutefois possibles grâce à la détente commerciale, ce qui stabiliserait les valorisations tout en offrant un potentiel de hausse supplémentaire.
    ✔    Un assouplissement de la part de la Banque Centrale Européenne (BCE) et de nouvelles mesures à venir. Le 5 juin, la BCE a d’ailleurs abaissé son taux de dépôt de 0,25 %, le portant à 2 %. Cette décision intervient dans un contexte de baisse de l'inflation en zone euro et de l'impact potentiellement négatif à court terme des droits de douane américains sur la croissance. La BCE devrait encore abaisser ses taux cette année. Nous prévoyons un taux final de la BCE de 1,75 % d'ici le 3e trimestre, ce qui laisse présager une autre baisse de taux au cours de l’été. Actuellement, les conditions financières de la zone euro favorisent la croissance économique grâce à l'expansion de l'activité de crédit.

    ✔    Une désescalade sur le front commercial devrait aussi donner lieu à des révisions haussières sur les anticipations de taux directeurs de la Réserve fédérale américaine (Fed) avec pourquoi pas une reprise de la baisse des taux directeurs à partir de septembre (actuellement inchangé entre 4,25 % et 4,5 % depuis décembre dernier).
    ✔    Un pétrole bas encore longtemps en raison du déséquilibre conjoncturel de l’offre et la demande lié bien sûr au ralentissement économique mondial en particulier celui de la Chine mais aussi à la progression spectaculaire des véhicules électriques dans les économies développées.

 

Stratégie d’investissement

Après leur net rebond au mois de mai, les indices actions pourraient marquer une pause, notamment si les négociations commerciales entre les Etats- Unis et l’Union européenne (UE) s’enveniment. En effet, les risques subsistent concernant les discussions entre les deux puissances, étant donné que l’Administration américaine a eu dernièrement une posture constamment hostile à l’égard de l’UE. De plus, la position ferme de la Chine dans ses négociations commerciales avec les Etats-Unis pourrait « « inspirer » l’UE. Dans ce contexte, nous estimons qu’une escalade temporaire des tensions est toujours possible entre l’UE et les Etats-Unis, avant qu’un compromis ne soit trouvé.
De même, les incertitudes macroéconomiques, bien que réduites, doivent toujours inciter à la prudence. Toutefois, les détails à venir sur les baisses d’impôts envisagées par l’Administration Trump au deuxième semestre 2025 pourraient soutenir dans un premier temps les marchés actions (impact positif sur le revenu disponible des ménages, meilleure rentabilité pour les entreprises, effet psychologique positif). Dans un second temps, ces baisses d’impôts poseront aussi la question de leur financement et de l’impact sur l’attractivité du marché obligataire américain et par conséquent sur les marchés actions mondiaux.

En fin de compte, l’Administration Trump pourrait avoir été plus stratégique qu’on ne le pense à propos de sa politique tarifaire. Un tarif uniforme de 10 % sur les importations, s’il n’entraîne pas de représailles, se rapprocherait du tarif « optimal » pour les États-Unis. Toutefois, l’intérêt de provoquer un tel choc avec ses partenaires commerciaux alors que le gain potentiel semble limité, fait réfléchir d’autant plus que les États-Unis dépendent fortement des capitaux étrangers pour financer leur dette. Par ailleurs, l’interdépendance sino-américaine est telle qu’une rupture économique entre les deux pays apparaît très improbable. Autrement dit, un accord entre les deux méga-puissances semble être l’issue la plus logique. En définitive, c’est l’incertitude créée par l’hostilité de cette politique commerciale qui pourrait in fine peser le plus lourdement, comme en témoignent les récentes enquêtes pointant une forte réduction des investissements aux États-Unis.

En résumé, il est encore trop tôt pour tirer des conclusions au vu de l’imprévisibilité du président américain et des potentielles mesures qu’il pourrait mettre en place dans les prochains mois. Ce manque de visibilité nous conduit pour le moment à ne pas vouloir toucher à l’allocation géographique et sectorielle de nos portefeuilles afin de nous donner le temps d’y voir un peu plus clair, d’autant plus que nos portefeuilles ont plutôt bien réagi au mois de mai en accompagnant la reprise des marchés actions. Notre scenario principal se fonde toujours sur l’hypothèse que D. Trump joue l’apaisement dans les discussions avec la Chine comme avec l’UE en adoptant une posture plus conciliante de sa politique des tarifs douaniers.

Comme nous l’indiquions le mois dernier, il est impossible de prévoir à l’avance le point de retournement des marchés durant une tempête boursière. C’est la raison pour laquelle nous conseillons toujours de faire le dos rond car la performance d’un portefeuille dépend en très grande partie de quelques rares séances de forte hausse. Dès lors, ceux qui cèdent à la panique se retrouvent doublement pénalisés. En bourse, les crises sont en effet sources d’opportunités. Comme nous le pensions, le calme est revenu sur les marchés. Pour autant, nous restons prudents mais optimistes pour la suite aux vues des toutes dernières nouvelles concernant cette question des droits de douane qui a véritablement hystérisé les marchés au cours des dernières semaines.

En conclusion, le « jour de la libération » américaine (le 2 avril dernier), a surtout été le premier jour d'un épisode douloureux de volatilité pour les investisseurs. Mais ceux qui ont su tenir la barre pendant cette période de gros temps en sortent récompensés puisque les marchés actions ont effacé leurs pertes d’avril pour revenir proche de leurs niveaux du mois de février.

Le feuilleton de la guerre commerciale se poursuit au mois de mai

La vie sans guerre commerciale ? De toute évidence, c’est impossible pour D. Trump. Il a mis la quasi-totalité de la planète sous la menace de droits de douane, menacé la Chine jusqu’à des niveau délirants de 145 %, joué l’apaisement en entamant des négociations, mais cela ne lui suffit pas. Voilà qu’à deux reprises ce mois-ci, il jette à nouveau de l’huile sur le feu en ravivant la guerre commerciale.

    ✔    D’abord contre l’Union européenne : alors que le mois de mai s’annonçait radieux d’un point de vue boursier, il s’est terminé sur une fausse note. Comme il fallait s’y attendre, D. Trump a trouvé le moyen de contrarier les marchés financiers et de faire chuter les places boursières à la suite d’une déclaration dont il est coutumier. Au gré des humeurs du président américain, les bourses mondiales ont donc plongé en flèche le vendredi 23 mai après-midi, après l’annonce d’une énième menace sur les droits de douane cette fois dirigée contre l’UE. Dans un post sur son réseau Truth Social, D. Trump a ainsi menacé de relever à 50 % les droits de douane sur les importations en provenance d’Europe dès le 1er juin. Une surprise totale, alors que la pause de quatre-vingt-dix jours dans cette guerre commerciale était censée durer jusqu’à la mi-juillet, période pendant laquelle la Commission européenne espérait parvenir à négocier un accord avec l’Administration américaine.
Bien malgré elle, l’UE a remplacé la Chine dans les obsessions du président républicain. Elle est subitement devenue « pire que la Chine », a vitupéré D. Trump. Elle avait été initialement frappée de droits de douane dit « réciproques » de 20 %, ramené à 10 % pendant la trêve décrétée par D. Trump après l’effondrement des marchés mondiaux début avril. Mais voici que, le président américain perd patience fustigeant un déficit commercial américain « inacceptable », des discussions avec l’UE qui « ne vont nulle part » et annonçant « recommander un droit de douane de 50 % sur l’UE à partir du 1er juin 2025 » sans même la volonté de chercher un accord. Stupeur à Bruxelles car si les négociations depuis des semaines ont donné peu de résultats, le sentiment était légèrement plus positif depuis quelques jours après que l’Administration Trump a pour la première fois écrit une lettre à la Commission européenne afin d’établir les bases d’une négociation. Celle-ci lui a répondu en lui proposant une nouvelle liste de concessions, notamment des achats dans l’énergie et une coopération stratégique dans les réseaux 5G et 6G. De plus, la proposition de la présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, d’un accord « zéro droits de douane » respectif sur les biens industriels, est restée lettre morte. En outre, après s’être rendu trois fois à Washington, le commissaire européen au Commerce, Maros Sefcovic, devait justement s’entretenir avec le représentant américain au Commerce Jamieson Greer, précisant que l’UE voulait un accord fondé sur le « respect » et sans « menaces » de la part de D. Trump. L’optimisme prudent des européens s’est donc évaporé en quelques instants. Évidemment, de tels droits de douane ne font que nuire à l’économie des deux Etats et ces nouvelles menaces n’aident en rien les négociations.
L’accès de colère de D. Trump vise en particulier le refus des Européens de transiger sur la TVA, les normes sanitaires et la réglementation des géants du numérique. La menace d’une hausse de 50 % des barrières douanières peut donc s’entendre comme une arme de pression maximale sur les Européens avant d’entrer dans des pourparlers sérieux. Mais l’UE, dont les exportations sont déjà toutes frappées d’un tarif de 10 % et de 25 % sur les voitures, l’acier et l’aluminium, ne se fait guère d’illusion quant à une résolution des tensions étant donné que le « deal » entre Washington et Londres, soi-disant accueilli favorablement de part et d’autre de l’Atlantique, prévoit le maintien d’une taxation à 10 % des exportations britanniques.

    ✔    Ensuite sur l’acier et l’aluminium : en invoquant des raisons déjà mille fois rabâchées, D. Trump a ajouté fin mai des taxes sur des importations déjà fortement pénalisées. Lors d’un déplacement en Pennsylvanie pour donner son accord au rapprochement entre le producteur d’acier US Steel et son concurrent japonais Nippon Steel, il a annoncé que les droits de douane sur l’acier et l’aluminium déjà surtaxés à 25 % passeraient à 50 % à compter du 4 juin. La décision américaine, qui accroît la pression sur les producteurs mondiaux d’acier, a suscité des protestations dans le monde entier. La Commission européenne a « vivement » déploré ce nouveau projet de taxes qui « compromet les efforts en cours pour parvenir à une solution négociée » et s’est dite prête à riposter avec des contre-mesures. Cette décision augmente « les coûts pour les consommateurs et les entreprises des deux côtés de l’Atlantique », a déclaré un porte-parole de Bruxelles en indiquant que, « si aucune solution mutuellement acceptable n’est trouvée, les mesures existantes et supplémentaires de l’UE entreront automatiquement en vigueur le 14 juillet, ou même plus tôt ».
La chambre de commerce du Canada a également dénoncé de son côté une mesure « contraire à la sécurité économique nord-américaine » car « démanteler les chaînes d’approvisionnement transfrontalières efficaces, compétitives et fiables comme celles que nous avons dans l’acier et l’aluminium a un coût élevé pour les deux pays ». Les États-Unis sont le premier importateur mondial d’acier, devant la Chine et l’Allemagne, et les nouveaux droits de douane devraient y entraîner une hausse généralisée des prix, qui affectera à la fois l’industrie et les consommateurs. L’aluminium et l’acier sont parmi les matières premières à avoir été sanctionnés dès le retour au pouvoir de D. Trump en janvier. En outre, des taxes de 25 % sur la plupart des importations sont déjà en vigueur depuis mars. Mais le président américain n’en démord pas : « la hausse des droits de douane », tout comme l’accord finalement conclu entre US Steel et Nippon Steel, contribuera à « préserver l’emploi des sidérurgistes aux États-Unis ».
Pour conclure, l’animosité de D. Trump ne se limite pas uniquement aux Etats. Dernièrement, il s’est également emporté contre la marque californienne Apple, menacée d’un droit de douane spécifique d’au moins 25 % sur les iPhones fabriqués hors des États-Unis, à savoir la totalité de la production. Là encore, la cohérence de cette déclaration peut échapper quand on sait que le président américain avait exempté les iPhones et autres produits électroniques de ses droits de douane envers la Chine. En définitive, les récentes sautes d’humeur de D. Trump réveillent chaque fois de douloureux souvenirs sur les marchés. Comme à chaque alerte, les grands indices sont tirés vers le bas par les grands exportateurs comme par exemple le CAC 40 avec ses fameux KHOL (Kering, Hermès, L’Oréal et LVMH). Le vent mauvais balaie alors l’ensemble des bourses mondiales y compris Wall Street.
 

 

La politique des droits de douane de Donald Trump contrariée par la justice américaine

Le 28 mai, trois juges du Tribunal fédéral américain ont estimé que le président Trump avait outrepassé ses pouvoirs en infligeant 10 % de surtaxe à l’ensemble des partenaires commerciaux des Etats-Unis, 25 % au Mexique et au Canada ainsi que 30 % à la Chine. Ce jugement constitue un revers juridique important pour D. Trump qui est engagé depuis le début de son second mandat dans une guerre commerciale avec tous les partenaires des États-Unis. Conséquence de cette décision, une grande partie des droits de douane punitifs imposés se trouve donc suspendue pour excès de pouvoir par une Cour fédérale de justice spécialisée dans le commerce international dont le jugement est exécutoire. La position de l’Administration Trump dans ses négociations en cours, notamment avec la chine et l’Union européenne, s’en trouve forcément fragilisée. Ainsi, les surtaxes annoncées le 2 avril, censées « libérer l’Amérique » (« Liberation Day ») et compenser des barrières douanières et non tarifaires érigées par de nombreux pays, sont de fait déclarées illégales, tout comme les sanctions appliquées aux produits mexicains, canadiens et chinois, supposées obliger ces pays à combattre le trafic de drogue. En revanche, les droits de douane fondés sur les articles d’autres lois commerciales américaines couvrant des secteurs spécifiques jugés victimes de pratiques déloyales, comme l’acier, l’aluminium, l’automobile ou les semi-conducteurs, ne sont pas affectés par la décision du tribunal new-yorkais.
Celui-ci considère que la loi de 1977, l’International Emergency Economic Powers Act (IEEPA), qui sert de base juridique à la déclaration d’urgence employée par le président des États-Unis pour surtaxer les importations de dizaines de pays, ne donne pas les pleins pouvoirs à l’exécutif pour agir à sa guise et imposer de telles sanctions, sans limite et sans contrôle du Congrès. En effet, la loi fédérale américaine autorise le président à réglementer le commerce après avoir déclaré une situation d'urgence nationale en réponse à une menace étrangère inhabituelle ou extraordinaire pour les États-Unis. En outre, cette loi concerne principalement les embargos et les sanctions commerciales mais ne mentionne pas les mesures de droits de douane. Le Tribunal fédéral n’a donc pas interprété que l’IEEPA conférait une telle autorité au président américain, jugeant ainsi les droits de douane comme illégaux. Le jugement intervient au moment où une vingtaine de pays, dont la Chine, le Japon, l’Inde, la Corée, ainsi que l’Union européenne négocient des accords commerciaux sous la menace de surtaxes massives à l’importation. La cour donne dix jours à l’Administration Trump pour éliminer les droits de douane imposés au titre de l’IEEPA. Si l’on en restait là, une grande partie de la guerre commerciale déclenchée par Washington à la planète entière serait déclarée illégale par une juridiction américaine, saisie par des sociétés américaines importatrices lésées par l’explosion de leurs coûts. Ces entreprises ont été soutenues dans leur démarche par une surprenante coalition de groupes de pression conservateurs attachés au libre commerce et d’États dirigés par des gouverneurs démocrates.

Bien entendu, la Maison-Blanche a immédiatement décidé de faire appel et a obtenu un sursis à exécution, conservant temporairement les droits de douane en attendant un autre appel sur le fond qui confirmera ou non la validité de la décision du Tribunal fédéral. In fine, ce sera la Cour suprême qui aura le dernier mot sur toutes ces procédures, dans la mesure où la juridiction ultime considérerait que des points cruciaux du droit auraient été mal interprétés. Cependant, le jugement du Tribunal fédéral paraît fondé. Jamais cette loi n’avait été invoquée auparavant par un président pour lancer des mesures massives de protection couvrant virtuellement toutes les importations de multiples pays. Par ailleurs, l’IEEPA ne contient même pas les mots « droits de douane » et d’après le même jugement, « l’urgence » elle-même invoquée par D. Trump n’est pas clairement fondée car finalement, en quoi l’accumulation depuis des années de déficits commerciaux avec la Chine ou l’Europe représenterait-t-elle tout à coup une « urgence nationale » ? Après tout, les États-Unis sont en période de forte croissance et de plein emploi.

Quoi qu’il en soit, le raisonnement des juges a été contesté en tous points par la Maison-Blanche qui estiment par la voix de Kush Desai, porte-parole de l’exécutif, que les pratiques commerciales déloyales « ont décimé des communautés américaines entières, abandonnant des travailleurs, et affaiblissant nos industries de base en matière de défense » ajoutant que « ces faits ne sont pas contestés par la cour » et « qu’il n’appartient pas à des juges non-élus de décider correctement ce qui constitue une urgence nationale(...)Le président Trump va user de tous les leviers du pouvoir exécutif pour traiter cette crise ».
En attendant, les trois magistrats du Tribunal fédéral ont également fondé une partie de leur argument sur le fait qu’en imposant des droits de douane de 25 % au Mexique, au Canada et à la Chine, l’Administration Trump n’influe pas directement sur le trafic de drogue et les importations de fentanyl. Les biens frappés par les surtaxes douanières punitives n’ont rien à voir avec la drogue. Les préjudices causés aux importateurs et aux consommateurs américains par ces prétendus remèdes douaniers sont donc par nature injustes.
Si la procédure d’appel venait à confirmer le jugement du Tribunal fédéral, l’Administration Trump pourrait alors invoquer une autre loi commerciale de 1974 en vue d’instaurer des droits de douane remplaçant ceux qui sont invalidés. Les alternatives offertes par le « Trade Act » sont néanmoins plus restrictives pour le président. Ce texte l’autorise ainsi à imposer des surtaxes mais pas au-delà de 15 % et pour seulement six mois, après quoi le Congrès doit voter pour les prolonger. Le texte prévoit aussi des sanctions, mais sur des secteurs spécifiques, au terme de périodes d’enquêtes et de commentaires publics qui durent des mois. Ces options pourraient prolonger une guerre commerciale, entretenir une incertitude décourageant les investissements et le commerce, même si l’intensité des sanctions serait moindre.

Il reste que l’esprit et la lettre de la Constitution américaine n’impliquent pas de déléguer au président, sans aucun contrôle ni a priori, ni a posteriori, sans limite dans le temps, le pouvoir de décréter des urgences pour ensuite édicter des droits de douane dans des proportions démesurées, puis de les abaisser selon son bon plaisir, dans l’idée d’intimider ou d’inciter des pays à négocier. Le contentieux, qui a un impact immédiat sur l’ensemble de l’économie mondiale, plaide aussi pour une intervention rapide de la Cour suprême pour préciser le droit. D’un point de vue boursier, le jugement du Tribunal fédéral a été favorablement accueillie par les marchés. Mais le rebond des indices a été de très courte durée puisque l’Administration Trump a immédiatement contesté cette décision devant la Cour d’appel fédérale fustigeant « un coup d’Etat judiciaire ». Ce recours a eu pour conséquence de suspendre automatiquement l’annulation des droits de douane le temps d’analyser la procédure d’appel mais aussi de replonger les marchés dans l’incertitude.

En conclusion, tant que le sujet de la guerre commerciale restera sur le terrain judiciaire, l’incertitude sur les marchés subsistera jusqu’à ce que, comme nous le pensons et l’espèrent les investisseurs, les négociations commerciales entre Etats aboutissent à de nombreux accords bilatéraux au terme de la pause de quatre-vingt-dix jours accordée le 9 avril par Washington à la plupart de ses partenaires commerciaux concernant les taxes douanières réciproques. Pour les consommateurs américains, cet épisode constitue un répit à court terme, mais il pose la question cruciale du financement budgétaire car en l’absence de nouvelles recettes douanières, le déficit pourrait continuer de s’aggraver, ce qui pèserait sur les obligations d’Etats américaine.

 

Achevé de rédiger le 9 juin par Nicolas Duplantier

 

A suivre dans les prochaines semaines :

  • Guerre commerciale : négociations avec la Chine et l’Union européenne, fin du délai de 90 jours
  • Évolution de la situation géopolitique : Ukraine, Proche-Orient
  • Réunions des banques centrales : BCE le 5 juin et Fed le 18 juin
  • Données macroéconomiques : inflation, emploi, PIB etc.

 

Veuillez trouver ci-dessous les liens d’inscription aux prochaines visioconférences :

S'inscrire à la visioconférence du jeudi 12 juin 2025

S'inscrire à la visionconférence du jeudi 10 juillet 2025

 

Bons investissements à tous, nous vous donnons rendez-vous le vendredi 4 juillet 2025 pour le prochain point mensuel, n’hésitez pas à nous contacter : votre conseiller, le service CAPG Gestion Conseillée (pggc@ca-pyrenees-gascogne.fr) et moi-même (nicolas.duplantier@ca-pyrenees-gascogne.fr) sommes à votre entière disposition.

 

L’illustration graphique présentée ne constitue pas une prévision de la performance future de vos investissements. Elle a seulement pour but d’illustrer les mécanismes de votre investissement sur la durée de placement. L’évolution de la valeur de votre investissement pourra s’écarter de ce qui est affiché, à la hausse comme à la baisse. En poursuivant votre navigation, vous reconnaissez avoir pris connaissance de cet avertissement, l’avoir compris et en accepter le contenu. Les informations et analyses diffusées par Parlons Patrimoine ne constituent qu’une aide à la décision pour les investisseurs. La responsabilité de la caisse régionale Crédit Agricole Pyrénées Gascogne ne peut être retenue directement ou indirectement suite à l’utilisation des informations et analyses par les lecteurs. Il est recommandé à toute personne non avertie de consulter un conseiller professionnel avant tout investissement. Ces informations indicatives ne constituent en aucune manière une incitation à vendre ou une sollicitation à acheter.
Les investissements présentés ici sont dynamiques et présentent un risque de perte en capital
L'adaptation de nos propositions au profil d'investissement de chaque client suit 4 règles principales :

  • Cantonnement : définition d'un pourcentage du patrimoine financier soumis au risque, avec un conseil et un suivi global sur la totalité des contrats intégrant ce risque (PEA, CTO et UC d'assurance-vie)
  • Diversification : géographique, thématique, devise, différentes stratégies et sociétés de gestion, ne pas empiler du risque par des actifs identiques : lignes différentes entre PEA, CTO et UC d'assurance-vie 
  • Volatilité/Gestion du risque : risque global (volatilité) relativement faible (par rapport au cac40 ou aux actions en direct par exemple), complémentarité des lignes dans le but de construire un portefeuille équilibré
  • Communication/suivi : mail et article mensuel sur www.ca-pg.fr, visio-conférence mensuelle
     
Liste de liens thématiques naviguez avec la touche navigation lien #Décryptage #Article