Point mensuel de mars 2025 - Investissements

07/04/2025 - 20 min de lecture

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Point mensuel de mars 2025 - Investissements

Plus encore qu’en février, les États-Unis ont été comme rarement au cœur de l’actualité géopolitique et économique au mois de mars. S’il a encore été beaucoup question de la guerre en Ukraine, l’intensification des pourparlers pour un cessez-le-feu n’a pas eu d’effet positif sur les actions européennes comme le mois dernier. En revanche, la surenchère par la Maison-Blanche concernant les annonces tous azimuts des tarifs douaniers a fait vivement réagir à la baisse l’ensemble des indices boursiers, hormis celui des pays émergents miraculeusement épargné par l’hécatombe.

Une fois n’est pas coutume, les actions émergentes sont les seules à ne pas avoir sombré dans ce contexte de fortes tensions et d’incertitudes. L’indice MSCI Emerging Markets est parvenu d’extrême justesse à se maintenir dans le vert (+ 0,38 %) ce qui est absolument remarquable compte tenu du naufrage des autres indices actions. Dans cette débâcle généralisée, la contreperformance des autres places boursières est globalement homogène. La zone euro qui avait été épargnée en février est rattrapée cette fois par le sujet des hausses de droits de douane, l’indice Euro Stoxx 50 chute de 3,95 %. Les actions japonaises et internationales suivent de près avec des indices qui dégringolent respectivement de 4,14 % pour le Nikkei 225 et 4,64 % pour le MSCI World. En revanche, plus dure sera la chute pour Wall Street qui corrige encore plus sévèrement ; le Standard & Poor’s 500 et le Nasdaq 100 dévissent de 5,75 % et 8,21 %. En effet, le niveau d’incertitude généré actuellement par l’administration Trump est tel qu’il alimente pour l’ensemble des marchés actions les craintes d’une reprise de l’inflation voire d’une possible récession aux Etats-Unis. La perte de confiance, certes provisoire, dans les actions américaines au cours des dernières semaines reflète ainsi la méfiance générale des investisseurs et explique les biens mauvais résultats de ce mois de mars. Enfin, nos portefeuilles reculent ce mois-ci de 4,80 %.

Comme chaque mois, voici le tableau des performances des investissements que nous conseillons : nous avons investi 100 000 euros sur chaque portefeuille type au 31 Décembre 2011, et nous donnons donc la performance du portefeuille et de chaque ligne pour les supports PEA et assurance-vie (Floriane, Espace Liberté et Anaé) au 31/03/2025.

 

Portefeuille type PEA* : valorisation : 275 921 €

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Portefeuille type Assurance-vie* (Floriane, Espace Liberté 1 & 2 et Anaé) : valorisation : 245 445 €

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* Allocation réservée aux clients de la Gestion Conseillée

 

Répartition du portefeuille actuel : 

répartition

 

Point marchés

Au cours du mois de mars, les États-Unis ont été comme rarement au cœur de tous les sujets pouvant retenir l’attention des investisseurs et risquant de fortement perturber les marchés financiers. Nous pouvons même dire que depuis l’investiture de Donald Trump le 20 janvier dernier, le monde a basculé dans une nouvelle ère. En à peine deux mois, les initiatives tous azimuts du nouveau locataire de la Maison-Blanche continuent de saturer l’espace médiatique mais surtout bouleversent les relations économiques et commerciales mais aussi diplomatiques entre les Etats. En quelques semaines seulement, tous les repères ont volé en éclat.

En premier lieu, sur le plan économique, où après s’être lancé dès le mois de février dans une guerre commerciale sur les tarifs douaniers touchant aussi bien ses plus proches partenaires (Mexique, Canada) que la Chine et l’UE, D. Trump n’a cessé durant tout le mois de mars de faire monter d’un cran les tensions commerciales. Comme il fallait s’y attendre, cette guerre commerciale pèse évidemment de plus en plus sur les places boursières mondiales. La pression baissière s’accentue particulièrement sur les indices américains qui à l’image du Nasdaq 100 entre dans une phase de correction (-13 % depuis son pic mi-février). Pour rappel, le terme de « correction » s’applique à un indice qui décroche de plus de 10 %, interrompant ainsi une tendance haussière. Le constat est presque identique du côté du Standard & Poor’ 500 qui a perdu près de 8 % depuis son pic. En parallèle, l’indice VIX, qui mesure la volatilité à 30 jours des actions américaines a presque doublé au cours du mois, se rapprochant des 30 points. Plusieurs éléments peuvent expliquer cette dégradation de la bourse américaine, dégradation qui s’est rapidement propagée aux bourses européennes :

    ✔    Tout d’abord, la guerre commerciale qui bat son plein : menée tambour battant par l’administration Trump, celle-ci alimente les craintes des investisseurs. L’imprévisibilité des hausses de droits de douane crée une incertitude qui pourrait peser sur l’économie américaine. Pourtant, la Maison-Blanche reste inflexible et minimise le risque de récession, affirmant qu’il s’agit d’une phase de « transition nécessaire pour restaurer la richesse du pays ». Après la signature par le président Trump du décret concernant la hausse de 25 % des droits de douane sur l’acier et l’aluminium (le 12 mars) visant principalement le Canada et l’UE, c’est au tour du secteur automobile d’être sous pression avec l’instauration d’une hausse des tarifs douaniers sur toutes les voitures importées sur le territoire américain. Ce décret du 26 mars devant s’appliquer dès le 3 avril a particulièrement crispé les investisseurs. Ces droits de douane s'appliqueront également aux principales importations de pièces automobiles, mais n’entreront en vigueur qu'à partir du 3 mai. Toutefois, les véhicules fabriqués au Mexique et au Canada intégrant des composants américains pourraient bénéficier de droits de douane plus allégés. Une manière pour le président d’éviter de potentielles représailles de ces deux pays. Ces mesures ciblant le secteur automobile ne sont pas anodines, puisque cette industrie représente environ un quart du déficit commercial américain en 2024. Le président américain entend ainsi augmenter les recettes douanières du pays et inciter les marques étrangères à relocaliser leurs usines sur le sol américain.
Cette mesure intervient à un moment particulièrement critique pour l’ensemble du secteur automobile européen, déjà confronté à de nombreux vents contraires : 1/ le ralentissement de la demande pour les véhicules électriques, 2/ la concurrence accrue des constructeurs chinois et 3/ le durcissement de la réglementation au sein de l’UE en lien avec les émissions de CO2. De nombreux pays ont critiqué ces nouveaux droits de douane, les jugeant nuisibles aux économies européenne et américaine, tout en appelant à des négociations urgentes pour éviter une escalade commerciale. Certains grands constructeurs européens ont indiqué ne pas être en mesure d’absorber ces droits de douane et ont déclaré qu’ils seront sans doute dans l’obligation de répercuter ces taxes sur les prix de vente des voitures neuves importées aux États-Unis. Les prix des voitures neuves importées aux États-Unis. Selon l’Association des constructeurs européens d’automobiles (ACEA), les marques européennes exportent entre 50 et 60 % de leurs véhicules aux États-Unis. En Europe, Porsche est l’un des grands perdants de la politique commerciale de Trump, car le groupe ne dispose pas d’usine aux États-Unis et exporte l’intégralité de ses véhicules dans le pays. Le groupe Stellantis (45 % de son chiffre d’affaires aux États-Unis) devrait également être touché car près de la moitié de ses véhicules vendus aux États-Unis sont assemblés à l’étranger. A l’inverse, Renault devrait être épargné en raison de son exposition très limitée au continent américain (environ 8 % de son chiffre d’affaires). Parmi les constructeurs américains, seul Tesla se démarque, car 100 % de ses véhicules vendus aux États-Unis sont produits localement, ce qui pourrait potentiellement soutenir l’activité du groupe, qui a vu ses revenus reculer de 6 % en 2024.

    ✔    Ensuite, les craintes d’un ralentissement de l’économie américaine qui s’intensifient : ainsi plusieurs indicateurs économiques avancés ont récemment fait l’objet d’une révision à la baisse. Parmi eux, la prévision de croissance américaine au premier trimestre 2025 par la Fed d’Atlanta est passée à 2,4 % alors que le consensus des économistes se situait autour d’une croissance de 2,5 %. Concernant l’inflation, l’IPC (indice des prix à la consommation) du mois de février aux États-Unis est ressorti en dessous des attentes à 2,8 % en rythme annualisé (vs 2,9 % attendu par le consensus). Ce niveau ne préjuge en rien l’impact inflationniste des éventuelles mesures de l’administration Trump dans les mois à venir (tarifs douaniers, réduction du taux d’imposition). Finalement, l’éventail des scenari reste très large pour l’évolution de l’économie américaine.

    ✔    Le segment technologique en souffrance : en 2025, les « Sept Magnifiques » ont perdu de leur superbe, expliquant en grande partie le net repli du Nasdaq. Sur la seule séance du 12 mars, Apple a perdu 5 %, tandis que Meta et Google ont chuté de plus de 4 %. Nvidia, déjà en fort repli (- 13 %) a encore perdu 5 %. Microsoft et Amazon ont quant à eux limité la casse. La principale baisse reste celle de Tesla (- 15 %), dont le titre a perdu plus de la moitié de sa valeur depuis son pic de décembre, en raison de ventes en chute libre et de la politisation croissante d’Elon Musk. Le poids de ces géants de la tech est devenu si important qu’une simple baisse suffit à faire plonger l’ensemble des indices américains.

En second lieu, sur le plan diplomatique et géopolitique, où le président américain n’a cessé d’être au centre des discussions en vue de parvenir au plus vite à un accord de cessez-le-feu entre l’Ukraine et la Russie. Certaines réunions ont d’ailleurs donné lieu à des épisodes mémorables d’une extrême tension comme ce fut le cas à l’occasion de la rencontre du 28 février à la Maison-Blanche entre D. Trump et V. Zelensky. Cette rencontre prévue initialement pour discuter d'un accord sur les minerais ukrainiens ne s’est pas déroulée comme prévu. La réunion a rapidement dégénéré en confrontation verbale suite aux échanges particulièrement tendus entre les deux dirigeants, D. Trump accusant notamment son homologue de « jouer avec la Troisième Guerre mondiale » en refusant de céder aux exigences russes pour mettre fin au conflit. La réunion s'est terminée prématurément sans signature d'accord, marquant une détérioration des relations entre les deux pays et ouvrant par la suite la voie à une série d’annonces majeures. Si les rencontres et les conversations téléphoniques se sont multipliées entre les dirigeants américains, russes et ukrainiens tout au long du mois de mars, aucune véritable solution de paix durable semble se profiler pour le moment (cf. « Les avancées en vue d’une fin du conflit en Ukraine ? »).

En revanche, l’omniprésence du président Trump sur le terrain géopolitique (Israël, Iran, Soudan) et en particulier sur le dossier ukrainien a entraîné plusieurs évènements majeurs. Ils découlent de la conséquence directe de l’arrêt du soutien de D. Trump à l’Ukraine mais aussi d’une mise en garde d’un désengagement des États-Unis dans la sécurité de l’Europe. Cette menace clairement assumée, a obligé le Vieux Continent à revoir ses priorités en matière de défense. Face à ce tournant historique des États-Unis dans leur vision diplomatique et leur stratégie militaire, deux décisions d’une importance considérable sont venues accompagner ce bouleversement dans les relations entre ces deux puissances alliées :

    ✔    La réponse immédiate de l’Europe : les dirigeants d’une quinzaine de pays européens se sont réunis à Londres à l’initiative du Premier ministre britannique Keir Starmer et du président français Emmanuel Macron. L’objectif de ce sommet était de renforcer le soutien à l’Ukraine et de trouver des solutions pour assurer la sécurité du Vieux Continent. Les dirigeants européens se sont ainsi engagés à accroître de manière substantielle leurs budgets militaires. Cette volonté s’est matérialisée quelques jours plus tard, lors d’un second sommet, cette fois-ci à Bruxelles. La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a présenté un plan ambitieux, nommé « ReArm Europe », visant à renforcer les capacités de défense de l'UE, dans un contexte de désengagement militaire des Etats-Unis vis-à-vis de ses alliés (retrait possible de l’OTAN ?). Dans le cadre de ce plan, l’UE mobilisera jusqu’à 800 milliards d’euros pour des dépenses militaires, dont 150 milliards sous forme de prêts destinés aux États membres pour soutenir leurs investissements dans la défense. L’UE devrait aussi autoriser les États membres à activer la clause dérogatoire du Pacte de stabilité (suspension temporaire de certaines règles budgétaires strictes), leur permettant ainsi de s'endetter davantage pour accroître leur budget de défense.
Toutes ces annonces ont eu un impact positif immédiat sur les marchés actions européens et a en particulier profité aux valeurs du secteur de la défense, qui ont poursuivi le rallye entamé depuis le début de l’année (Rheinmetall : + 100 %, Thales : + 77 %, Leonardo : + 75 %, Dassault Aviation : + 52 %, Safran : + 19 %, Airbus : + 7 % etc.).

    ✔    Le changement de cap de l’Allemagne : parallèlement à l’initiative européenne, l'Allemagne a exprimé sa volonté de renforcer significativement sa capacité militaire, marquant ainsi un tournant majeur dans sa politique budgétaire. Le futur chancelier Friedrich Merz, a opéré un virage radical de la politique budgétaire du pays en matière de dépenses pour la défense et pour les infrastructures, virage qui reconfigure les équilibres en Europe et au-delà. Historiquement attachée à ne pas dépasser un certain seuil de déficit budgétaire, Berlin a annoncé sa volonté de débloquer 500 milliards d’euros sur dix ans (un peu plus de 10 % du PIB allemand) pour renforcer et moderniser son armée fédérale la Bundeswehr mais aussi pour développer ses infrastructures. Les dépenses de défense du pays devraient ainsi se rapprocher progressivement du seuil annuel de 3 % du PIB (vs 2 % actuellement) soit un niveau similaire à celui des Etats-Unis. Selon les premières estimations, un tel plan pourrait contribuer à la croissance du PIB à hauteur de 1 à 1,5 % supplémentaire par an en Allemagne, au cours des prochaines années. Si cette idée semble séduisante sur le papier, sa mise en œuvre peut s’avérer complexe compte tenu d’un certain nombre de contraintes budgétaires et politiques. Mais les chefs des partis susceptibles de former la future coalition (CDU/CSU et SPD) ont décidé de soumettre au Parlement une proposition visant à amender la Constitution allemande. L'objectif est d'exclure les dépenses militaires des restrictions constitutionnelles encadrant le déficit public. En somme, les partis conservateur et social-démocrate souhaitaient lever le frein à l’endettement, une règle constitutionnelle stipulant que le déficit allemand ne devait pas dépasser 0,35 % du PIB. Cette mesure avait notamment été assouplie pendant la pandémie de Covid-19, pour permettre au gouvernement d’augmenter exceptionnellement ses dépenses pour soutenir l’économie et le système de santé. Un premier vote est intervenu au Bundestag le 13 mars suivi par un deuxième le 27 mars deux jours après l'entrée en fonction du nouveau parlement.

Au mois de mars, le contexte pour le moins agité a fait particulièrement souffrir les places boursières. Les indices actions ont dans leur immense majorité lourdement chuté en raison de l’accélération du risque accru sur les droits de douane. Seuls les pays émergents parviennent à échapper à la contagion ; leur indice MSCI Emerging Markets réussit l’exploit de terminer le mois dans le vert à + 0,38 %. A l’instar de leur difficile début d’année, les indices américains encaissent une nouvelle fois un bien mauvais résultat. Le Dow Jones recule de 4,2 % et le Standard & Poor’s 500 de 5,75 %. La baisse la plus sévère est l’œuvre du Nasdaq 100 avec un plongeon de 8,21 % dans la continuité des difficultés rencontrées par le secteur de la tech qui traverse toujours une période compliquée. Wall Street subit de plein fouet le niveau d’incertitude généré actuellement par l’administration Trump mais aussi les craintes d’une reprise de l’inflation et d’une possible récession aux États-Unis. De leur côté, les actions japonaises et internationales reculent respectivement de 4,14 % pour le Nikkei 225 et 4,64 % pour le MSCI World.
En Europe, l’Euro Stoxx 50 et le CAC 40 baissent respectivement de 3,94 % et 3,95 %. La bourse de Francfort limite quant à elle la casse et ne consolide que de 1,72 %. Les indices de la zone euro sont à leur tour rattrapés par les menaces de nouvelles barrières douanières appliquées à leurs exportations sur le sol américain.
 

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Depuis le début de l’année, les indices actions enregistrent toujours des écarts de performances importants. Malgré la forte baisse des marchés actions au mois de mars, les places boursières du Vieux Continent font nettement la course en tête. Ainsi, l’Euro Stoxx 50 progresse encore de 7,2 % tandis que le marché parisien (CAC 40) suit avec une performance de + 5,56 %. La bourse de Francfort est toujours loin devant avec indice DAX à + 11,32 %. Les actions des pays émergents ne déméritent pas avec une hausse de 2,41 % de l’indice MSCI Emerging Markets. Les autres indices se trouvent tous en territoire négatif. Les actions internationales limitent le mieux la casse et voient leur indice MSCI World reculer de 2,14 %. Les grands indices américains sont tous dans le rouge. Le bon vieux Dow Jones s’en sort bien avec un recul de 1,28 % suivi par le Standard & Poor’s 500 (indice de référence des investisseurs) qui chute de 4,37 %. A l’autre bout du spectre, deux indices subissent une forte pression baissière et entrent dans une phase de correction; le Nasdaq 100 et l’indice japonais Nikkei 225 corrigent respectivement de 10,42 % et de 10,72 %.

Sur le marché des taux, les obligations ont continué de subir une grande volatilité au cours du mois de mars. L’impact du plan allemand, sitôt l’annonce du futur chancelier Merz, a été très violent sur les obligations européennes puisque le Bund allemand à 10 ans a progressé en une seule journée (le 5 mars) de près de 50 points de base (+ 0,5 %). En effet, si le stimulus budgétaire allemand doit doper la croissance en berne de l’Allemagne mais aussi de la zone euro, il pourrait également raviver l’inflation. En mars, le taux du Bund à 10 ans est passé de 2,386 % à 2,727 % (+ 14,27 %) tandis que l’OAT française à 10 ans suivait plus ou moins la même direction en passant de 3,140 % à 3,445 % (+ 9,71 %). Cette forte tension sur les taux européens ne s’est pas propagée sur le rendement du 10 ans américain qui est resté de marbre passant de 4,202 % à 4,210 % (+ 0,19 %).
Depuis le début de l’année, l’obligation américaine à 10 ans reste logiquement en nette baisse à 4,210 % fin mars contre 4,572 % fin décembre (- 7,92 %). Les taux souverains de la zone euro subissent naturellement les conséquences de la forte tension du mois de mars ; le taux de l’OAT française à 10 ans est passé de 3,194 % fin décembre à 3,445 % fin mars (+ 7,86 %) tandis que le Bund 10 ans est passé sur la même période de 2,362 % à 2,727 % (+ 15,45 %).

Sur le marché des matières premières, l'or a atteint un nouveau sommet le 31 mars à 3 155 dollars l’once. Le métal précieux continue d’opérer comme valeur refuge face notamment aux incertitudes autour de la politique économique de D. Trump (Cf. « L’or franchit pour la première fois la barre symbolique des 3 000 dollars »).

Du côté du pétrole, le cours du Brent de la mer du Nord (référence des investisseurs) reste stable, Il est revenu à son niveau de début d’année passant de 74,64 dollars le baril fin décembre à 74,77 dollars fin mars soit une hausse de 0,17 %. Nous maintenons notre scenario d’un prix du Brent à 65 dollars le baril en moyenne en 2025 et à 60 dollars à partir de 2026.

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Convictions

Le message que la Maison-Blanche essaie de faire passer pour justifier de sa stratégie sur les droits de douane est que la période actuelle « va être dure à court terme mais que c’est pour le bien commun à long terme » autrement dit un mal pour un bien. Pour l’instant, la politique tarifaire brouillonne de l’administration Trump contribue surtout à renforcer l’incertitude des investisseurs et l’attentisme des entreprises et des ménages. Dans les enquêtes d’opinion, les anticipations d’inflation augmentent. Même si elles ne sont pas encore à un niveau problématique, la tendance est à surveiller. Tout cela incite à la prudence car une chute prononcée des actions américaines finira tôt ou tard par se répercuter sur les actions européennes, parfois encore plus violemment.

Dernièrement, les marchés financiers ont fait les montagnes russes et ont dû s'adapter à des conditions très changeantes. En l'espace de quelques semaines, l'alliance militaire atlantique a été affaiblie, ce qui a entraîné d'importantes annonces de dépenses de défense dans toute l'Europe. De plus, la vague sans précédent de droits de douane a fait subir de fortes pertes aux actions américaines et par contagion aux autres places boursières. A ce jour, les marchés actions manquent singulièrement de visibilité. Aux États-Unis, les investisseurs ont été confrontés à un tourbillon d'annonces, parfois contradictoires, ce qui a fortement perturbé les marchés.
En fin de compte, les marchés s'inquiètent désormais du risque de récession aux États-Unis, car les enquêtes sur la confiance des consommateurs envoient des signaux d'alerte.
Les droits de douane risquent de nuire aux consommateurs, une douleur que la nouvelle administration s'est auto-infligée alors que l'économie américaine tournait à plein régime avant l'élection américaine. Dit autrement, la forteresse américaine a été attaquée, mais de l’intérieur. Fort heureusement, les créations d'emplois publiées montrent que l'économie américaine reste sur des bases solides. En revanche, la confiance des entreprises semble délicate aux États-Unis. En effet, les inquiétudes économiques grandissantes, liées à l’impact sur la croissance de la politique commerciale de D. Trump pèsent sur le moral des directeurs d’achats américains (entreprises). Cette situation est surtout visible sur le compartiment manufacturier, dont l’indice s’est contracté à 49, 8 en mars (contre 52,7 en février).
De même, les craintes liées à l’impact inflationniste de la politique commerciale de D. Trump, entraînent une détérioration du sentiment des ménages. Le moral du consommateur américain a chuté à un plus bas de quatre ans à 92,9 points, contre 96 points attendu et après 100,1 un mois plus tôt.

La surprise, que nous avions sous-estimée, est que les actions américaines ont été les plus vulnérables aux incertitudes commerciales. Les marchés européens et chinois ont ainsi nettement surperformé au cours des trois derniers mois. C'est une surprise, car ils sont en temps normal plus sensibles aux guerres commerciales que l'économie américaine qui dépend davantage de la demande intérieure. Mais le marché a toujours raison et nuire au consommateur américain peut en effet se retourner contre l’économie américaine de manière spectaculaire.
L’Europe va-t-elle bénéficier d’un moment décisif ? Le « quoi qu’il en coûte » de l’UE (le plan « ReArm Europe ») en matière de défense marque sans aucun doute un tournant. Il en va de même concernant le plan allemand de 500 milliards d'euros même si ce dernier est étalé sur 10 ans. Cependant, il faut garder à l'esprit que ce « quoi qu’il en coûte » fiscal n'aura probablement pas le même impact de marché que le « whatever it takes » monétaire de Draghi en 2012.
D’autres catalyseurs devraient également permettre de soutenir les actions européennes : 1/ la confiance des consommateurs orientée à la hausse, 2/ la poursuite de l’assouplissement de la politique monétaire de la BCE, 3/ la valorisation attractive des marchés européens qui attirent toujours les investisseurs (niveaux records de collecte des fonds indiciels européens par rapport aux fonds américains), 4/ la résolution du conflit en Ukraine, 5/ la relance chinoise qui pourrait apporter des surprises positives.

Pour l'avenir, nous pensons que D. Trump restera réceptif aux signaux du marché car les ménages américains sont largement investis dans les actions et que sa cote de popularité recule. En outre, la baisse des prix de l'énergie est un vent favorable pour les consommateurs car elle compensera en partie la hausse des droits de douane. Nous pensons que la stratégie de D. Trump consistera finalement à trouver des marges de manœuvre budgétaires pour réduire le taux d'imposition sur les sociétés. A l’avenir, passer des guerres commerciales aux baisses d'impôts sera beaucoup plus favorable aux actifs risqués. Dans notre stratégie d’investissement, nous nous abstenons de traiter l’actualité à chaud car le sentiment de marché peut changer rapidement, tout comme D. Trump peut brutalement faire volte-face.

En résumé, sous l’impulsion du président Trump, le marché a reçu un nombre effréné d’informations et de chocs externes dont les impacts sont encore incertains. La nouvelle administration américaine communique tous azimuts et inonde le monde par le nombre de ses annonces, actions et commentaires. L'attention des investisseurs se concentre plus que jamais sur les annonces commerciales, car les marchés n'ont pas encore pleinement évalué la combinaison potentielle des politiques de D. Trump. Nous nous attendons à ce que la volatilité persiste tant qu’il y aura de nouvelles annonces comme par exemple une escalade sur les tarifs douaniers. Toutefois, si l’administration Trump adopte une approche tactique au lieu de s'engager dans une guerre commerciale acharnée, nous pensons que les marchés actions resteront résilients et rebondiront à plus ou moins brève échéance.
En parallèle à ce contexte inédit, les équilibres géopolitiques mondiaux sont sérieusement mis à mal et l’hégémonie américaine en matière d’IA est questionnée par la startup chinoise Deepseek. En outre, l’Europe se décide enfin à se doter d’une défense plus autonome et même l’Allemagne se dit prête à abandonner sa sacro-sainte orthodoxie budgétaire.
L'incertitude politique croissante générée par l’administration américaine et les préoccupations tarifaires commencent à peser sur l'investissement et la consommation intérieure des États-Unis. Elles alimentent les craintes d’une récession et/ou d’une reprise de l’inflation aux Etats-Unis. La perte de confiance dans les actifs américains au cours des dernières semaines reflète bien la méfiance des investisseurs. Cependant, un boycott total des actifs américains semble improbable.

En conclusion, L'incertitude mondiale est à un niveau sans précédent en raison du changement de politique américaine concernant l'Ukraine, des multiples augmentations des droits de douane, du ralentissement de la croissance américaine et de la détérioration du sentiment des ménages et des entreprises aux Etats-Unis. Dans l'ensemble, même si cette incertitude est accrue, les marchés devraient être portés par un contexte économique redevenu positif au cours du deuxième semestre. Vers la fin de l'année, l'impact des droits de douane sur la croissance économique et l'inflation nous diront s’ils auront entraîné des révisions à la baisse des bénéfices des entreprises, ce qui pourrait conduire les investisseurs à prendre moins de risque. Enfin, toute aggravation de la pression tarifaire ou l’absence d'un cessez-le-feu en Ukraine justifierait une attitude plus prudente. Pour l’instant, nous restons positifs sur les actions au niveau mondial, tout en restant vigilants.

 

Les avancées en vue d’une fin du conflit en Ukraine ?

L'Ukraine a accepté une proposition des Etats-Unis pour un cessez-le-feu immédiat de 30 jours avec la Russie après les discussions du 11 mars en Arabie saoudite et l’acceptation de l’accord sur les minerais. En réponse, l’administration Trump a annoncé la reprise des livraisons d'armes à l'Ukraine, conformément aux budgets approuvés sous l’ère Biden et à la coopération en matière de renseignement. Dès lors, la balle se trouvait dans le camp de la Russie qui n'a pas formulé tout de suite de réponse officielle à cette proposition de trêve. Le Kremlin a déclaré qu’il attendait des détails supplémentaires de Washington avant de formuler une réponse. De son côté, D. Trump a envoyé une délégation de négociateurs américains en Russie pour préparer une proposition de cessez-le-feu.
Le 19 mars, l’entretien téléphonique très attendu entre D. Trump et V. Poutine n’a débouché que sur des résultats limités. Le président américain espérait obtenir un cessez-le-feu immédiat et global en Ukraine, mais son homologue russe n’a accepté qu’une trêve partielle et temporaire, limitée aux infrastructures énergétiques, un geste peu significatif. Sur le terrain, la situation est restée inchangée ; les combats ont continué avec des frappes mutuelles de missiles et de drones. Moscou et Kiev s’accusaient d’ailleurs mutuellement de nouvelles attaques démontrant que l’accord n’a eu aucun impact immédiat sur le conflit.
Toutefois, cet entretien téléphonique a permis d’illustrer le déséquilibre dans les négociations : Moscou impose son tempo et parvient à transformer la discussion en un processus interminable, tandis que Washington peine à obtenir des résultats concrets. Au vu de sa domination sur Kiev, il semble peu probable que la Russie cède facilement devant l’administration américaine. Pour le moment, V. Poutine n’a fait que rappeler ses exigences de départ : 1/ l’arrêt de l’aide militaire occidentale à l’Ukraine, 2/ pas d'adhésion à l'OTAN pour l'Ukraine, 3/ pas de « soldats de la paix » de l'OTAN en Ukraine, 4/ l'Ukraine doit être « démilitarisée et dénazifiée » et 5/ les quatre régions du Donbass devront être reconnues comme territoires russes. En échange, le président russe s’engage à cesser toutes les hostilités et à garantir la paix en Ukraine.
En conclusion, l’accord de cessez-le-feu marque au minimum un début d’amélioration dans les relations américano-ukrainiennes, après l’échec de la dernière réunion entre les deux présidents à la Maison Blanche le 28 février dernier. Si Moscou y adhère à son tour, l’arrêt des combats peut être le prélude à des négociations de paix après trois années d’une guerre meurtrière. Celles-ci risquent toutefois d’être beaucoup plus difficiles que les dernières discussions en Arabie saoudite. Les dernières rencontres semblent également traduire une logique où seuls les États-Unis et la Russie semblent peser, laissant l’Europe et l’Ukraine en marge des décisions. Toutefois, si D. Trump continue de montrer le même empressement à négocier, cette situation pourrait être perçue comme une faiblesse.

 

La politique asynchrone des banques centrales européenne et américaine

    ✔    Du côté de la Banque centrale européenne (BCE), le Conseil des gouverneurs a abaissé une nouvelle fois ses taux directeurs, lors de sa réunion du 6 mars. Le taux de dépôt a ainsi été réduit à 2,5 % (référence de la Banque centrale), tandis que le taux de refinancement se situe désormais à 2,65 %. Il s’agit de la 6e baisse de taux depuis juin 2024 (en huit mois seulement) et de la 5e baisse consécutive. Il atteint son niveau le plus bas depuis février 2023 et se situe déjà 1,5 % en dessous de son pic de 4 % au cœur de la crise inflationniste à l’automne 2023.
Largement attendu par le marché, ce nouvel assouplissement n’a pas eu d’impact majeur sur la tendance boursière. Les investisseurs se sont surtout concentrés sur le discours de Christine Lagarde qui a confirmé qu’aux niveaux actuels, la politique monétaire devenait « moins restrictive ».
Ce constat a renforcé les attentes de certains à propos d’une pause à venir dans le cycle d’assouplissement de la BCE ; entre autres, la voix d’Isabel Schnabel, économiste allemande membre du directoire. Cette idée est toutefois contrebalancée par le rehaussement de ses estimations d’inflation ainsi que par l’abaissement de ses prévisions de croissance pour 2025. La BCE a en effet actualisé ses prévisions sans toutefois avoir pu prendre en compte les effets des plans d’investissements dans la défense et les infrastructures annoncés par l’Europe et l’Allemagne. Pour cette année, l’institution de Francfort table désormais sur une inflation de 2,3 %, contre 2,1 % précédemment. Ses économistes estiment encore que le produit intérieur brut (PIB) de la zone euro progressera de 0,9 % en 2025, quand ils tablaient sur 1,1 % en décembre dernier. Ces données sont cruciales car elles motiveront les prochaines décisions de la BCE.
Selon nous, il est encore tôt pour confirmer une pause du cycle de baisse des taux de la BCE, d’autant plus que le contexte économique et géopolitique a beaucoup évolué depuis deux mois. Christine Lagarde a souligné le caractère particulièrement « mouvant » de la période faisant allusion à la menace des tarifs douaniers américains qui plane sur l’Europe et qui pourrait avoir des retombées plus ou moins favorables (tensions inflationnistes, hausse du PIB ?).

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    ✔    Du côté de la Réserve fédérale américaine (Fed), le Comité fédéral lors de sa réunion du 19 mars a maintenu à l’unanimité la fourchette de ses taux directeurs inchangée à [4,25 % - 4,5 %] tout en annonçant un ralentissement du rythme de réduction de son bilan dès avril pour soutenir les marchés financiers. La Fed réduira ainsi le plafond mensuel des rachats de bons du Trésor de 25 à 5 milliards de dollars. Selon J. Powell, cette décision vise uniquement à limiter les tensions sur les marchés monétaires et ne reflète pas un changement d’orientation sur le long terme. A l’inverse de la BCE, l’institution a néanmoins adopté une approche attentiste en raison de l’incertitude liée aux politiques de l’administration Trump et à leurs impacts sur l’inflation, la croissance et l’emploi. L’économie américaine reste toujours résiliente et J. Powell a insisté sur la solide dynamique du marché du travail, en relativisant la détérioration des indicateurs de confiance. En attendant, la Fed a quand même réduit ses prévisions de croissance de l’économie américaine de 2,1 % à 1,7 % pour 2025, tandis que la cible d’inflation a été rehaussée de 2,5 % à 2,7 % (2,2 % pour 2026 et 2 % pour 2027). L’inflation reste donc sous surveillance et ce, même si l’impact des tarifs douaniers ne devrait être que temporaire. Pour 2025, le comité s’attend à une baisse de 50 points de base de ses taux directeurs (2 fois 0,25 %) d’ici la fin de l’année, pour atteindre la fourchette [3,75 % - 4,0 %]. A ce stade, une amplitude de baisse similaire est attendue en 2026. À l'arrivée, la Fed reste selon nous en position d’attente évitant de s’engager prématurément sur une trajectoire de baisse des taux. Un scenario de statu quo jusqu’en juin semble de plus en plus probable, renforçant notre hypothèse d’une pause prolongée dans le cycle de détente monétaire. Dans ce contexte, les marchés devront composer avec une incertitude persistante sur l’évolution des taux. Toute anticipation d’un assouplissement rapide pourrait être prématurée.

 

 

L’or franchit pour la première fois la barre symbolique des 3 000 dollars

En ces temps troublés, l’or confirme son indétrônable statut de valeur refuge en temps de crise. Ainsi, le métal jaune a-t-il dépassé pour la première fois la barre des 3 000 dollars le 14 mars. Un seuil stratosphérique que peu d’investisseurs imaginaient atteignable il y a un an encore. Début 2024, il valait autour de 2 000 dollars l’once, un niveau déjà très élevé. Fin mars il a franchi le niveau historique de 3 155 dollars et sa progression n’est sans doute pas terminée. Quelles sont les explications à une telle envolée ?

    ✔    Les tensions commerciales sur les droits de douane : au cours du mois de mars, le « clash » entre D. Trump et V. Zelensky à la Maison-Blanche, qui acte un revirement stratégique des États-Unis et pousse l’Europe à se réarmer, a donné un coup de fouet supplémentaire au cours de l’or, toujours perçu comme une garantie en cas de crise. Cette nouvelle hausse est à attribuer à ce revirement et aux incertitudes que cela entraîne pour l’Ukraine et pour l’Europe.
À cela s’ajoutent les hausses de droits de douane sur l’acier, l’aluminium et les voitures, ou les menaces sur la France ou l’UE de taxes à 200 % sur les champagnes, vins, spiritueux et autres alcools si les nouveaux droits de douane à venir de 50 % de l’UE sur le whisky américain ne sont pas retirés. Depuis sa prise de fonction le 20 janvier, le président américain a lancé toute une série d’offensives commerciales contre ses alliés (Canada, Mexique) comme ses concurrents (Chine, UE entre autres), affirmant que les États-Unis sont injustement traités dans les échanges internationaux.
Résultat, le prix de l’or augmente alors que les discussions sur les droits de douane réduisent l’appétit pour le risque et poussent les investisseurs vers le métal précieux considéré comme une valeur refuge. Les multiples revirements du président américain (annonces, suspensions, puis applications ou exemptions) plongent les acteurs économiques dans l’inconnue. Ces tensions commerciales ont fait baisser le cours des actions américaines ce qui a conduit de gros détenteurs à vendre et à aller vers l’or. De plus, en renchérissant le prix des produits importés, ces taxes font craindre un retour de l’inflation outre-Atlantique. Or, le métal jaune est traditionnellement vu comme la meilleure protection contre la hausse des prix qui érode la valeur des devises.

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    ✔    L’incroyable succession de crises internationales : certes, la bonne forme de l’or n’est pas nouvelle, mais l’accumulation de crises ces dernières années (Covid 19, invasion de l’Ukraine en 2022, crise bancaire aux États-Unis en 2023, conflit entre Israël et le Hamas fin 2023 etc.) a fait voler le précieux métal de record en record. Les crises internationales sont la première raison du niveau élevé des cours, c’est une évidence. Par ailleurs, l’amorce d’un cycle de baisse des taux directeurs par les banques centrales (Fed, BCE, BOE etc.) en 2024 a maintenu l’or à des niveaux élevés. L’or ne produisant pas de rendements, les taux bas rendent son coût de détention compétitif car à l’inverse, lorsque les taux d’intérêt sont élevés, il est coûteux d’en détenir.
Résultat, l’éternelle valeur refuge crève les plafonds : l’once a gagné près de 40 % en un an (+ 78 % sur cinq ans), repoussant toujours plus loin les limites. Rien qu’en 2024, le précédent record a été battu pas moins de 40 fois, selon le World Gold Council (WGC), l’institution de référence sur l’or. Ses performances sont comparables à celle d’un actif spéculatif tout en étant éminemment moins risqué qu’un certain bitcoin qui a pu rapidement perdre 80 % de sa valeur au cours de sa courte histoire.

    ✔    La forte demande des banques centrales : plus fondamentalement, le cours de l’or est aussi soutenu par une demande toujours plus pressante de gros acheteurs internationaux. En premier lieu, celle des banques centrales toujours plus acheteuses (Chine, Russie, Turquie…), qui cherchent à sortir de leur dépendance au dollar. Selon le WGC, ces achats ont dépassé pour la troisième année consécutive les 1 000 tonnes en 2024 et en 2025 et les achats des banques centrales pourraient à nouveau dépasser ce seuil.

    ✔    L’incroyable demande des particuliers dans le monde : déçus par la bourse et le krach de l’immobilier dans leur pays, la ruée des chinois sur l’or a également contribué à gonfler la demande et donc, a soutenu les cours. Preuve de cet appétit toujours vivace, le régulateur chinois vient d’autoriser dix compagnies d’assurances chinoises à investir dans l’or dans le cadre d’un programme pilote, pour permettre aux particuliers d’en détenir dans un portefeuille mobilier.
Les Indiens, qui acquièrent de l’or pour la bijouterie, sont en revanche un peu moins présents, après avoir été traditionnellement très acheteurs ces dernières années. A contrario, les sommets atteints par les pièces et les lingots aiguisent beaucoup plus l’appétit des européens et particulièrement des Français. Plus le cours monte, plus l’appétit pour l’or se fait visible car les Français ont l’habitude d’acheter quand les cours montent, c’est un réflexe classique. Ces achats ne sont pas réservés aux clients les plus fortunés. Les lingotins accessibles à partir de petits grammages (plus d’un gramme), connaissent aujourd’hui un franc succès. Certains acheteurs, plus aisés, voient aussi dans l’or une façon de protéger leur patrimoine par crainte de voir la valeur de l’euro s’éroder. Ils cherchent à sécuriser une partie de leur épargne détenue en banque. Un réflexe classique en temps de crise. L’idée que l’or physique ne peut pas faire défaut reste présente dans les esprits des particuliers.
Quoi qu’il en soit, cet appétit pour la « relique barbare » contribue à faire pression sur l’offre, comme rarement. Le dirigeant d’une grande fonderie suisse confiait que la production de lingots de ces huit prochaines semaines était déjà réservée à l’achat, c’est dire combien l’offre est sous tension.

Pour finir, l’appétit pour le métal précieux ne concerne pas que l’or physique. Sur les plateformes d’épargne, les ETF or, fonds indiciels qui répliquent le cours de cette matière première et sont accessibles à partir de quelques euros seulement, se placent aujourd’hui dans le trio de tête des ETF les plus achetés derrière l’ETF Actions Monde MSCI World et celui répliquant les 500 plus grosses valeurs boursières américaines, le S&P 500.
Mais ce n’est pas tout. Les niveaux records du métal jaune poussent aussi de nombreux particuliers à vendre leurs bijoux de famille. Un scenario habituel quand l’or atteint des sommets. En quête de liquidités, ces derniers revendent des pièces achetées il y a longtemps ou des bijoux afin de libérer un peu de cash. La liquidité de l’or (très facile à revendre partout dans le monde), reste pour les investisseurs institutionnels comme pour les particuliers un de ses atouts majeurs.
 

L’annonce choc des nouveaux tarifs douaniers de la Maison-Blanche

Comme il le souhaitait, tous les regards sont actuellement tournés vers D. Trump en ce début du mois d’avril. L’administration américaine a célébré le 2 avril ce que la Maison-Blanche avait nommé le « jour de la libération », la date qui visait à annoncer un arsenal inédit de nouvelles taxes douanières sur les biens importés dans le but de défendre l’économie américaine. Cette révolution voulue par D. Trump « Make America Wealthy Again » (« Rendez sa richesse à l’Amérique ») est fondée sur une guerre commerciale poussée à l’extrême avec le reste du monde afin de résorber le déficit commercial de près de 1 400 milliards de dollars des Etats-Unis concentré principalement sur les quinze principaux partenaires commerciaux (les « Dirty 15 ») accusés de creuser le déficit commercial des Etats-Unis.

 

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Le président américain a donc renoncé comme cela était initialement envisagé à une taxe universelle allant jusqu’à 20 % sur toutes les importations des partenaires commerciaux des Etats-Unis (solution qui aurait été disproportionnée puisque dans certains cas elle aurait été plus élevée que les droits de douane imposés comme par exemple ceux de la Chine sur les produits américains. Finalement, D. Trump a déclaré le soir du 2 avril qu’il avait choisi dans une logique de réciprocité, d’appliquer des barrières douanières à tous les Etats qui imposent des droits de douane aux exportations américaines, mais surtout, il a annoncé une approche ciblée visant individuellement chaque pays présentant un important déficit commercial avec les États-Unis. Concrètement, des droits de douane généralisés de 10 % minimum s’appliqueront de manière indifférenciée à toute importation arrivant aux États-Unis. Mais les pays avec lesquels les Etats-Unis ont un très grand déficit commercial auront droit à un traitement particulier. A titre d’exemple, la Chine se voit appliquer une barrière de 34 %, l’UE de 20 %, le Vietnam de 46 %, Taiwan 32 %, le Japon 24 %, l’Inde de 26 %, la Corée du Sud 25 % etc. Selon l'administration américaine, ces nouveaux tarifs pourraient générer environ 600 milliards de dollars par an et pourraient être utilisés pour réduire les impôts sur le revenu.  

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Jusqu’au dernier moment, certains Etats ont essayé de multiplier les négociations avec Washington dans l’espoir d’échapper à ce nouveau train de taxes. Le Vietnam a mis en avant une réduction de certains droits de douane qui frappaient leurs importations de voitures, de gaz ou de denrées agricoles en provenance des Etats-Unis. D’autres comme Taiwan ou la Corée du Sud ont annoncé des investissements de plusieurs dizaines de milliards de dollars de la part de leurs fleurons industriels (TSMC, Hyundai) avec l’implantation de nouvelles usines sur le sol américain (autre but recherché par l’administration américaine). Malheureusement, leur démarche n’aura pas suffi à faire fléchir la Maison-Blanche. Après une telle onde de choc, nul doute qu’une intense phase de négociations s’ouvrira très rapidement.

La revanche des marchés européens

Nous les avions quittés moribonds, délaissés et même « sans intérêt » pour un grand nombre d’investisseurs et voici les indices boursiers du Vieux Continent largement en tête de peloton en ce début d’année 2025. En ce début d’année, les bourses européennes passent du statut de « vilain petit canard » à celui de « star » des marchés actions mondiaux.

Ainsi, les grands indices actions européens affichent une progression nettement supérieure à tous les autres grands marchés actions et commence à faire cogiter les allocataires d’actifs.
Dans la mesure où les investisseurs sont des acteurs rationnels et les marchés sont efficients - du moins en théorie - ce changement de dynamique boursière doit nécessairement traduire une évolution objective des fondamentaux de cette zone d’investissement.
Pourtant du point de vue de la macroéconomie européenne, cette embellie boursière ne semble à l’évidence pas se retrouver dans la dynamique de croissance européenne. En effet, les perspectives de croissance du PIB de la zone euro ont été révisées à la baisse en début d’année (0,9 % vs 1,1 % précédemment).
Si l’explication de ce regain d’optimisme de la zone euro n’est pas macroéconomique, elle se situe ailleurs et notamment dans l’anticipation par les investisseurs d’une politique monétaire plus accommodante de la part de la BCE mais également dans les anticipations de croissance des bénéfices des entreprises européennes revues à la hausse ces deux derniers mois. Le consensus attendait fin 2024 une croissance des bénéfices comprise entre 3 et 5 %, actuellement, il la situe plutôt entre sur une 7 et 8 %.
Si les deux arguments de la politique monétaire et de la croissance des bénéfices sont incontestables, ils ne constituent pas pour autant les véritables moteurs à la surperformance des bourses européennes sur les autres places boursières sur ce premier trimestre. En réalité, bien que plus difficile à concevoir car moins rationnelle, l’explication la plus plausible repose selon nous sur deux catalyseurs moins évidents ou disons plus subtils, à savoir l’espoir et le repositionnement des investisseurs sur le marché actions européen.
D’abord, l’espoir que la situation s’améliore progressivement en zone euro à la faveur d’une alternance politique en Allemagne qui permettrait un redémarrage de la principale économie de la zone en panne de croissance depuis deux ans. Espoir également d’un accord de paix en Ukraine qui résoudrait les sujets d’approvisionnement et de coût de l’énergie et dont le gigantesque chantier de reconstruction bénéficierait à l’économie de tout le continent. S’il est pour le moment difficile pour un économiste d’intégrer ces deux espoirs à ses prévisions chiffrées, il est revanche possible pour les investisseurs de quantifier le potentiel boursier additionnel que ces deux facteurs de soutien représentent.
Ensuite, comment passer à côté de l’explication des performances boursières de la zone euro sans évoquer les flux et le positionnement des investisseurs. Il n’aura probablement échappé à personne que l’Europe est la zone sur laquelle les flux de décollecte ont été les plus massifs en 2024. Dans les enquêtes de positionnement, c’était également la zone sur laquelle les gérants semblaient le moins exposés. Dès lors, un repositionnement sur les actions européennes (même modeste) pour combler une trop grande sous-pondération peut entraîner une assez forte performance de ces actifs. C’est précisément ce que montre les statistiques de collectes de ces dernières semaines.
Dans le conte d’Andersen, levilain petit canard se transforme en un cygne magnifique. Sans rêver à pareille destinée pour les bourses européennes, il conviendra tout de même qu’une partie des espoirs formulés se concrétisent pour que ce premier trimestre d’allégresse boursière ne se transforme pas en chant du cygne pour les marchés européens.

 

 

Achevé de rédiger le 3 avril par Nicolas Duplantier

 

A suivre dans les prochaines semaines :

  • Risque d’escalade dans la guerre commerciale
  • Évolution de la situation géopolitique : cessez-le feu en Ukraine et conflit au Proche-Orient
  • Données macroéconomiques : inflation, emploi, PIB etc.
  • Réunions des banques centrales : BCE le 17 avril et Fed le 7 mai
  • Début des publications des résultats des entreprises au 1er trimestre 2025

 

Veuillez trouver ci-dessous les liens d’inscription aux prochaines visioconférences :

S'inscrire à la visioconférence du jeudi 10 avril 2025

 

S'inscrire à la visioconférence du jeudi 15 mai 2025

 

 

 

 

 

Bons investissements à tous, nous vous donnons rendez-vous le mercredi 7 mai 2025 pour le prochain point mensuel, n’hésitez pas à nous contacter : votre conseiller, le service CAPG Gestion Conseillée (pggc@ca-pyrenees-gascogne.fr) et moi-même (nicolas.duplantier@ca-pyrenees-gascogne.fr) sommes à votre entière disposition.

 

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Les investissements présentés ici sont dynamiques et présentent un risque de perte en capital
L'adaptation de nos propositions au profil d'investissement de chaque client suit 4 règles principales :

  • Cantonnement : définition d'un pourcentage du patrimoine financier soumis au risque, avec un conseil et un suivi global sur la totalité des contrats intégrant ce risque (PEA, CTO et UC d'assurance-vie)
  • Diversification : géographique, thématique, devise, différentes stratégies et sociétés de gestion, ne pas empiler du risque par des actifs identiques : lignes différentes entre PEA, CTO et UC d'assurance-vie 
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  • Communication/suivi : mail et article mensuel sur www.ca-pg.fr, visio-conférence mensuelle
     
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