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Point mensuel mai 2022 - Investissements
13/06/2022 - 20 min de lecture
Rubrique : Assurance
tout un mag pour vous
Les marchés boursiers mondiaux ont été stables au cours du mois de mai. Comme depuis trois mois, le conflit en Ukraine, la situation sanitaire en Chine et le durcissement des politiques monétaires des banques centrales continuent de peser sur les actifs risqués en raison de la persistance des craintes liées à la croissance et à l’inflation. Les places boursières se tiennent en un très faible écart. Le Japon, l’Europe et les Émergents ont progressé respectivement de 1,6 %, 0,9 % et 0,4 %. Le marché américain à l’équilibre (+ 0,1 %) ferme la marche. Le cours du pétrole a fortement augmenté ce mois-ci (+14 % pour le Brent et + 9 % pour le WTI) en raison de l’accord de l’UE pour un embargo sur le pétrole russe et du déconfinement progressif de la Chine. L’euro s’est légèrement apprécié face au dollar (+ 1,9 %) suite à la communication de la BCE concernant le possible début du resserrement de sa politique monétaire. Nos portefeuilles progressent ce mois-ci de 1 %.
Par rapport à nos concurrents (catégorie Quantalys allocation Monde offensive), notre avance est de 46,3 %* avec une performance globale de 134,6 %* depuis le 31/12/2011. Résultats de nos conseils d’investissements au 30/04/2022 :
Comme chaque mois, voici le tableau des performances des investissements que nous conseillons : nous avons investi 100 000 euros sur chaque portefeuille type au 31 Décembre 2011, et nous donnons donc la performance du portefeuille et de chaque ligne pour les supports PEA et assurance-vie (Floriane, Espace Liberté et Anaé) au 30/04/2022.
Portefeuille type PEA : valorisation : 242 785 €*
Portefeuille type Assurance-vie (Floriane, Espace Liberté 1 & 2 et Anaé) : valorisation : 219 027 €*
*La mise à jour des performances au 31/05 n’a pas pu être réalisée
Répartition du portefeuille actuel :
Point marchés
Le mois de mai s’achève et nous sommes bien obligés de constater que les marchés financiers continuent d’être chahutés par les mêmes troubles qui, depuis le début de l’année, perturbent l’environnement économique, financier et géopolitique : menaces sur la croissance, politique de la Fed, guerre en Ukraine, Covid en Chine. Les marchés actions ont donc de bonnes raisons d’être déboussolés et « l’exubérance irrationnelle », pour reprendre l’expression d’Alan Greenspan en 1996, n’est pas la seule explication du trouble qui les touche car les circonstances de la correction depuis le début de l’année n’ont jamais été aussi complexes. En effet, il ne s’agit pas simplement de digérer la décision de la réserve fédérale de relever fortement et pendant plusieurs mois son taux directeur resté anormalement bas trop longtemps. Il ne s’agit pas non plus de négocier uniquement le virage de la désinflation, censé permettre de passer (sans récession) de 8,4 % de hausse des prix en avril aux Etats-Unis à quelque 2 % en un peu plus d’un an. Cette mission quasi impossible est à elle seule de nature à inquiéter des marchés chroniquement optimistes. En fait, les investisseurs vont aussi devoir faire face à une réduction massive et sans précédent du bilan de la Fed. Cette opération qui démarre en juin élimine durablement du marché une partie importante de la demande d’obligations du Trésor américain. La Fed n’a plus l’intention de racheter à n’importe quel prix le papier du Trésor comme c’était le cas depuis mars 2020 au début de la crise du Covid. A cela s’ajoute un contexte international extraordinairement instable. La guerre en Ukraine, la menace nucléaire brandie par Vladimir Poutine, les armes occidentales provoquent ainsi une incertitude totale pour des investisseurs qui peinent à garder leur sang-froid. Enfin, dernier facteur de risques, le reconfinement de villes chinoises en raison d’une politique sanitaire qui montre largement ses limites. Ces décisions provoquent des arrêts de production qui pèsent sur les chaînes d’approvisionnement déjà fragilisées par le conflit russo-ukrainien. Ainsi, replacé dans cet environnement, il est même surprenant que les places boursières n’aient pas davantage décroché.
Le mois de mai a donc été marqué par une forte hausse des rendements obligataires sur l'ensemble de la courbe ce qui a pénalisé les actions en particulier les valeurs de croissance. La priorité des banques centrales de lutter contre l’inflation a également pesé sur les valeurs plus cycliques. Au niveau mondial, les valeurs de croissance (Growth) ont reculé de 2,5 % sur le mois par rapport aux valeurs décotées (Value). Géographiquement, cela se traduit par une sous performance des Etats-Unis (+ 0,1 % pour le S&P 500) par rapport au Japon (Nikkei +1,6 %), à la zone euro (Euro Stoxx 50 + 0,9 %), et aux Emergents (+ 0,4 %). En Europe sur le plan sectoriel, l’énergie, les matériaux de base, l’automobile, les banques et les secteurs défensifs (services publics, les services de communication) sont les seuls secteurs à finir le mois dans le vert. En revanche, la technologie, l’immobilier et la consommation discrétionnaire sont les plus touchés par la hausse des taux.
L'inflation a atteint un nouveau point haut en zone euro à 8,1% (vs 7,4 % en avril). Aux États-Unis, le chiffre de l’indice des prix à la consommation qui ne sera publié que le 10 juin prochain est également attendu autour de 8,1 % (vs 8,4 % en avril) ce qui laisse à penser que la première économie mondiale a peut-être atteint son pic inflationniste contrairement à l’Europe. Dans ces conditions, les banquiers centraux n’ont pas d’autre alternative que de durcir leur position en accélérant leur resserrement monétaire. En hausse pour le sixième mois consécutif, le pétrole a été tiré vers le haut par les spéculations concernant un éventuel embargo de l'UE sur le pétrole russe et par la reprise récente de la demande chinoise (premier consommateur mondial) suite à l’allègement des mesures de confinement à Shanghai et Pékin. Du côté des métaux précieux, l’or qui est souvent considéré comme une couverture contre l'inflation et les incertitudes, a enregistré une performance de -2,1 %. La hausse des taux d'intérêt a atténué son attrait en augmentant le coût d'opportunité de sa détention. Dans ce contexte plein d’incertitudes, les marchés financiers sont toujours indécis et font preuve de fébrilité. Les investisseurs se détourne encore des actifs risqués par manque de visibilité sur les marchés. Les principaux indices restent toujours en territoire négatif depuis le début de l’année :
La visibilité reste faible à court terme, mais il faut rappeler qu’en l’espace de quelques mois l’environnement macro-économique a beaucoup changé. A la fin de l’année dernière, les marchés étaient sur une tendance de ralentissement de l’activité économique mondiale et de normalisation des politiques monétaires des banques centrales après une croissance historique en 2021 suite à la très forte reprise post-Covid. Par la suite, après l’invasion de l’Ukraine par la Russie, les investisseurs sont passés assez vite à un scénario de crainte de stagflation ce qui a contribué à accentuer la nervosité des marchés. Enfin, dernièrement, les marchés semblent redouter une récession en Europe et aux États-Unis. Ils doivent donc digérer toutes ces évolutions ce qui explique le niveau de volatilité encore assez élevé. En légère baisse par rapport aux mois dernier, les indices de volatilité des marchés actions américain (VIX) et européen (V2X) se situent respectivement à 26 et 25.
Tout l’enjeu est de savoir si nous allons vers une récession ou si les banques centrales vont être capables d’enrayer cette dynamique inflationniste sans pour autant trop affaiblir la croissance. Historiquement, si nous regardons les périodes au cours desquelles les marchés sont baissiers (« bear market »), un cycle de marché baissier, avec récession, se traduit par une correction des actions d’environ 30 % sur environ vingt mois, tandis qu’un cycle de marché baissier, sans récession, entraîne une chute des actions d’environ 22 % sur un peu plus de quatre mois. Si nous nous penchons sur la situation actuelle, entre le plus haut (début janvier) et le plus bas (début mars), nous nous trouvons à peu près dans cette dernière configuration. Nous sommes donc un peu à la croisée des chemins. Alors, nous dirigeons-nous vers une récession ? Si oui, il va falloir dans ce cas intégrer une nouvelle baisse des marchés actions. Sommes-nous plutôt dans un scénario de marchés qui ont déjà anticipé cette dégradation de la croissance mondiale sans tomber en récession ? Oui, nous penchons davantage vers cette hypothèse. Cependant, il est tout à fait possible que le marché puisse s’interroger en se disant qu’une récession est peut-être le prix à payer pour purger toutes ces pressions inflationnistes qui sont à l’œuvre depuis un an.
En résumé, malgré cette période troublée, les marchés financiers n’ont jamais donné l’impression de capituler comme ce fut le cas en mars 2020 au début de la crise du Covid. Durant tout le mois, les indices actions ont évolué en dents de scie sans véritable direction. Ils ont alterné les séances de hausse et de baisse, pour à l’arrivée rester stables. Les investisseurs donnent toujours le sentiment d’avoir intégré que cette guerre au cœur de l’Europe prendra fin et que ses conséquences sur le plan économique et financier seront assez limitées dans le temps. Ils restent très attentifs et sensibles à la situation sanitaire en Chine, à l’inflation qui n’a toujours pas atteint son pic et aux perspectives de croissance mondiale sachant que l’ensemble de ces sujets sont intimement liés. En attendant une amélioration du contexte géopolitique et sanitaire, la nervosité des marchés devrait rester présente encore quelques temps et les rebonds fragiles. Les investisseurs continueront à faire preuve de prudence. Un retour complet à la confiance n’est pas pour tout de suite.
Convictions d’investissements
De nombreux économistes ont aujourd’hui une vision négative de l’économie mondiale. Ils anticipent une récession imminente dans un contexte inflationniste toujours prégnant. Il n’est évidemment pas question pour nous de nier les vents contraires soufflant sur l’activité ou de contester la hausse globale des prix, cependant nous ne partageons pas cette analyse. Nous maintenons que le ralentissement économique reste limité en raison de fondamentaux solides et que l’inflation, même si elle restera élevée en 2022, devrait atteindre un pic d’ici à la fin de l’été avant de commencer à ralentir durant la seconde partie de l’année. Ainsi, d’après ces cassandres, la récession serait inévitable. Le président Harry Truman disait : « il y a récession quand votre voisin perd son travail et dépression quand vous perdez le vôtre ». Sur la base de cette citation, il nous semble difficile d’imaginer une récession aux Etats-Unis tant le marché de l’emploi est solide, avec une offre souvent supérieure à la demande. La consommation reste également un moteur puissant et nous constatons même une nouvelle accélération depuis le mois de mars ce qui permettra d’alimenter positivement le PIB du deuxième trimestre. Une réserve de consommation semble par ailleurs exister car tous les biens qui n’ont pas pu être produits du fait des dysfonctionnements des chaînes d’approvisionnement seront à nouveau disponibles (en particulier pour l’automobile). Même si la réserve d’épargne des ménages américains a été récemment entamée, celle-ci reste importante. Nous pouvons ajouter que les indicateurs industriels se maintiennent à des niveaux satisfaisants. Ainsi, l’indicateur des biens manufacturiers aux Etats-Unis (ISM) surprend positivement en mai en s’inscrivant en légère hausse (56,1 vs 55,4 en avril), nous pouvons en déduire que le PIB du deuxième trimestre devrait s’afficher clairement en territoire positif.
En Europe, les faits sont à peu près similaires, même si le moral des acteurs économiques est davantage affecté en raison de la proximité de la guerre. Le pessimisme des ménages ne se répercute pourtant pas nécessairement sur les chiffres réels de consommation. L’Europe ralentit, c’est un fait, mais ce ralentissement reste à ce stade mesuré. En Allemagne, le premier problème industriel reste l’automobile. Nous anticipons une amélioration lente à mesure que les chaînes d’approvisionnement des composants électroniques seront rétablies.
Dans ce contexte, quelles sont nos perspectives économiques ?
Les pressions stagflationnistes devraient s'accentuer, c'est à dire que nous devrions voir simultanément une pression à la baisse sur l'activité économique et à la hausse sur les niveaux de prix. En d’autres termes, moins de croissance et plus d’inflation. Plus précisément, nous attendons cette année pour la zone euro 2,3 % de croissance, ce qui signifie une croissance ralentie. Il faut avoir à l'esprit que le Vieux continent est particulièrement touché par les conséquences sur les prix de l'énergie de la guerre en Ukraine, mais également par les nouveaux confinements décidés par les autorités chinoises qui vont avoir un impact sur la croissance mais également sur l'ensemble des chaînes d'approvisionnement.
Sur le front des prix, le maintien à un haut niveau des matières premières alimente à court terme les pressions inflationnistes. Pourtant nous constatons depuis peu une augmentation de l’offre de pétrole dans le monde alors que la demande stagne, voire diminue légèrement. La « driving season » aux Etats-Unis pourrait toutefois changer la donne. Quoiqu’il en soit, les effets de base aidant, nous pensons que la courbe d’inflation pourrait avoir atteint un pic et devrait commencer à décélérer dans les prochains mois. Elle restera cependant très supérieure à l’objectif affiché des 2 % et nécessitera une poursuite du mouvement de hausse des taux de la part des banques centrales. Sur la partie plus structurelle de l’inflation qui concerne à ce jour essentiellement les Etats-Unis, nous remarquons une légère décélération des salaires depuis trois mois. C’est une bonne nouvelle, mais cette variable doit être surveillée car le manque de main d’œuvre pourrait contraindre les entreprises à reprendre leur mouvement de hausse des rémunérations. L’immobilier américain, du fait d’un déficit d’offre, contribuera aussi à l’inflation future dans le pays. L'économie américaine devrait être plus résiliente avec une croissance autour de 3,1 % cette année.
Quelles sont nos recommandations en matière d'investissement ? La situation actuelle nous incite à garder une certaine prudence, à rester investis sur nos positions de long terme et à laisser inchangée l’allocation de nos portefeuilles. Toutes les classes d’actifs ont été touchées par les évènements récents. Les obligations ont brusquement corrigé et les actions, essentiellement les grandes valeurs de croissance, ont subi de forts dégagements. Cette correction importante depuis le début de l’année redonne des valorisations intéressantes sur la plupart des actifs. La poussée inflationniste et le ralentissement économique sont déjà en bonne partie intégrés par les marchés. Les marchés obligataires ont déjà pris en compte les politiques monétaires attendues du côté des banques centrales. Nous nous attendons à une stabilisation des taux d'intérêt à dix ans aux Etats-Unis au voisinage du niveau actuel c’est-à-dire entre 2,5 % et 3 %. Nous restons constructifs sur les obligations des pays émergents, qui devraient bénéficier de la stabilisation attendue des taux d'intérêt à long terme aux Etats-Unis, mais aussi d'une amélioration de l'écart de croissance en faveur des économies émergentes par rapport aux économies avancées. En matière d'allocation d'actifs, nous continuons toujours de préférer les actions aux obligations. Du côté des actions, la sélection des titres est plus que jamais essentielle que ce soit en Europe ou aux Etats-Unis. Nous pensons qu'une combinaison de titres décotés et de valeurs de qualité est le meilleur moyen pour tirer son épingle du jeu. Il existe des opportunités du côté des entreprises dont les profits sont susceptibles de résister au ralentissement économique et qui sont moins sensibles à la remontée des prix et des taux d'intérêt. Comme nous le rappelons toujours, la diversification demeure essentielle pour permettre aux investisseurs de mieux naviguer dans cet environnement de marché trouble.
En conclusion, comme le mois dernier, les investisseurs vont continuer de scruter l’évolution de la situation en Ukraine. Comme toujours, le rôle des banques centrales et des gouvernements continuera d’être primordial pour veiller à l’équilibre de l'économie mondiale. Nous pensons que la question de l’inflation primera sur celle de la croissance car la guerre en Ukraine et la situation sanitaire en Chine constituent un facteur d’aggravation de la hausse des prix. Pour autant, nous identifions des facteurs atténuants. Ainsi, les effets de base sur l'inflation sont sur le point de devenir plus favorables (comparaison par rapport à mai 2021) et les hausses des prix liés au Covid (perturbations de la chaîne d'approvisionnement) et à l’Ukraine (énergie, matières premières, denrées alimentaires) devraient progressivement s’estomper. Nous nous attendons à ce que l'inflation reste élevée en 2022 (autour de 5 %) et qu’elle atteigne peut-être un pic d’ici la fin de l’été avant de commencer à baisser durant la seconde partie de l’année mais tout cela repose plus sur un sentiment qu’une véritable conviction. Finalement, si comme nous l’espérons le conflit russo-ukrainien devait ne pas s’enliser, les conséquences économiques devraient rester supportables et permettre à l’économie mondiale de se rétablir progressivement des deux chocs majeurs que sont la pandémie du Covid et la guerre en Ukraine. Alors, les marchés actions pourront repartir à la hausse en 2022. Dès lors, les investisseurs doivent se tenir prêts à ajuster leur allocation. Nous nous attendons à ce qu'il y ait davantage d'ajustements sur les marchés actions en particulier ceux qui pourraient souffrir de risques de récession (ce n’est pas notre scénario) avec, au premier rang, les marchés actions européens plus exposés au conflit russo-ukrainien. Les divergences de marché offriront plus tard des opportunités pour recalibrer l'exposition aux actifs risqués vers des zones plus résilientes.
La Fed intensifie son resserrement monétaire
Malgré le risque d’affaiblir la croissance, la banque centrale américaine continue donc de faire de l’inflation sa priorité. Avec une inflation au plus haut depuis quarante ans, la Réserve fédérale est obligée de frapper fort. Elle s’engage donc dans une politique de remontée rapide et significative du coût du crédit en vue de saper l’excès de demande qui nourrit l’inflation. Après un premier relèvement de 0,25 % de son principal taux directeur le 16 mars dernier, une nouvelle hausse de 0,5 % de la fourchette de variation est intervenue le 04 mai (1ère hausse de taux de 50 points de base depuis 22 ans et Alan Greenspan). La banque centrale des États-Unis devrait annoncer une série de hausses de 0,5 % lors de ses prochaines réunions de juin et juillet prochains ce qui porterait ce taux dit des «Fed funds», auquel les banques se prêtent de l’argent à très court terme, entre 1,75 % et 2 % (actuellement entre 0,75 % et 1 %). En outre, la Fed a laissé entendre qu’elle poursuivrait ses hausses de taux en vue de les porter à 3 % d’ici à la fin de l’année, voire plus si la situation l’exige. Alors que la Réserve fédérale tente ainsi de juguler l’inflation, certains comme Roger Ferguson (ancien numéro deux de la Fed de 1999 à 2006) estime « qu’une récession en 2023 est presque inévitable », car «la Fed ne peut que contrôler la demande agrégée et ne peut pas agir sur l’offre ». L’inflation qui se situe autour de 8,3 % depuis mars est en effet le résultat d’un excès de la demande, par rapport à une offre limitée par une double pénurie de main-d’œuvre et d’approvisionnements.
La Fed va également commencer en juin son cycle de réduction mensuelle du montant des créances qu’elle a accumulées depuis 2020. Son bilan a plus que doublé pour atteindre 9 000 milliards de dollars en raison de sa politique « d’assouplissement quantitatif ». Pour ramener son bilan à un niveau plus normal, elle va cesser à un rythme élevé de racheter des obligations sur le marché (à hauteur de 47,5 milliards de dollars chaque mois). La banque centrale veut par ce moyen faire monter les rendements obligataires à moyen et long terme. En fait, dans l’économie réelle, la hausse de taux a déjà commencé depuis cinq mois. Le rendement des obligations à deux ans du Trésor est par exemple passé de 0,73 % début janvier, à 2,85 % fin mai. L’emprunt à dix ans vient de franchir le seuil de 3 %. De fortes reventes de titres obligataires par les investisseurs, à la fois en réaction à la flambée des prix mais aussi en anticipation d’une succession de hausses de taux de la Fed ont renchéri le coût effectif du crédit pour les entreprises et les particuliers. La Fed est très critiquée pour avoir attendu si longtemps avant de s’attaquer au mal sournois qui appauvrit la population et dont on avait oublié les méfaits depuis plus d’une génération. Leur retard les oblige à hausser le ton et à interrompre la politique conçue en mars 2020 pour combattre la déflation provoquée par le Covid. La remontée des anticipations inflationnistes est particulièrement préoccupante. Elle montre que les consommateurs comme les entreprises s’attendent à des hausses de prix de plus en plus nettes.
La Fed vise un retour à la « neutralité », comme première étape. Cette notion théorique correspond à un niveau de taux directeur qui ne stimule pas la demande mais qui ne limite pas non plus l’activité. D’après Larry Summers (ancien secrétaire au Trésor de Bill Clinton et ex-conseiller de Barack Obama), « pour réduire l’inflation, il faut relever les taux au-dessus de leur niveau de neutralité ». Cet économiste, est alarmé par l’accélération à 4,5 % des hausses de coûts de main-d’œuvre au premier trimestre, qui montre que la spirale inflationniste est engagée. Selon lui, « si l’inflation est autour de 3 à 4 %… il faut donc que les “Fed funds” soient entre 4, 5 et 5 % pour abaisser l’inflation de manière significative ». Il reste donc beaucoup de chemin à faire à Jerome Powell pour normaliser sa politique monétaire avec le risque d’affaiblir la croissance. Face à cette délicate feuille de route, le président de la Fed a toutefois rappelé qu’il était impossible de communiquer des indications prospectives claires (« forward guidance ») au-delà de soixante à quatre-vingt-dix jours. La Fed assume ainsi un retour à ce qu’elle appelle la « data dépendance ». Elle concède ne pas savoir exactement combien de temps l’inflation restera élevée. Elle reconnait que les dernières crises ont entraîné un changement du monde et qu’elle doit s’adapter en conséquence. J. Powell, a déclaré que la Banque centrale américaine continuerait à augmenter ses taux d'intérêt jusqu'à ce qu'il y ait des preuves claires et convaincantes que l'inflation recule.
La première hausse des taux de la BCE durant l’été
Les marchés financiers l’ont déjà intégré, la hausse du taux directeur de la BCE et la fin de l’expérience des taux négatifs se confirment comme imminentes. Christine Lagarde a un peu plus détaillé ce calendrier déjà esquissé lors d’interventions récentes. Le programme des rachats d’actifs (« quantitative easing ») s’achèvera « au tout début du troisième trimestre » ce qui « nous permettra de relever notre taux lors de notre réunion de juillet ». Dès lors la BCE sera en mesure de sortir des taux négatifs d’ici la fin du troisième trimestre avec une possible nouvelle hausse au cours de la réunion de septembre. Autrement dit, le taux de dépôt de la BCE fixant la rémunération des avoirs que les banques lui confient, passera de - 0,5 % actuellement (une taxe sur l’argent qui dort et qui ne finance pas l’économie réelle) à 0 %. Ce calendrier indicatif qui annoncerait deux hausses successives de 0,25 % le 21 juillet puis le 08 septembre serait même une affaire conclue puisqu’il y aurait déjà consensus au sein du Conseil des gouverneurs. Certains « faucons » partisans d’un resserrement monétaire rapide n’excluent pas une hausse plus franche d’un demi-point dès juillet. Un peu tardivement par rapport à d’autres grandes banques centrales (Réserve fédérale ou Banque d’Angleterre), la BCE entérine donc la normalisation de sa politique monétaire ultra accommodante en place depuis 2009 en réaction à une inflation qui vient d’atteindre en zone euro 8,1 % en mai (vs 7,4 % en avril). Impossible dans ces conditions de conserver des taux négatifs. In fine, cela revient à reconnaître l’entrée dans une nouvelle ère d’inflation plus forte. Reste à vérifier si ce relèvement programmé des taux, qui sera vraisemblablement annoncé le 9 juin prochain, suffira à apaiser la hausse des prix sans trop menacer la croissance du PIB de la zone euro.
A-t-on atteint un pic inflationniste ? Probablement pas, mais se prononcer actuellement dans un sens ou dans l’autre relève plus de la chance ou du hasard étant donné que personne ne peut dire où en seront les principaux facteurs générateurs de tensions inflationnistes. En effet, qui peut prétendre savoir comment évoluera le conflit en Ukraine ? Qui peut affirmer que les goulots d’étranglement et les dysfonctionnements des chaînes d’approvisionnement mondialisées seront en voie de résorption dans les toutes prochaines semaines. Enfin, qui a la moindre idée de la situation sanitaire en Chine ? En fin de compte, une baisse prochaine de l’inflation dans la zone euro n’est pas plus en vue qu’un pic à 9 % en septembre. Une inflation se stabilisant ou diminuant entre 5 % et 6 % à la fin de l’année constituerait une divine surprise.
Nous atteignons un point critique pour la vie économique de la zone euro. Depuis plusieurs mois, nous savons que l’inflation est désormais élevée, et qu’elle va persister à des niveaux que nous n’avions plus connus ces dernières décennies. Les facteurs derrière l’augmentation des prix sont multiples : la reprise de l’activité économique en 2021 a créé une pression par la demande au moment où les chaînes de production faisaient face à des difficultés d’approvisionnement, puis les cours des matières premières et de l’énergie se sont envolés dans le sillage de la guerre en Ukraine et des tensions géopolitiques associées. Malheureusement, ce choc géopolitique a également incité les consommateurs à plus de prudence, ce qui a eu pour effet le ralentissement économique observé au premier trimestre. Cependant, nous ne sommes pas encore dans un scénario de stagflation, qui représenterait un fonctionnement de l’économie où les hausses de prix ne peuvent pas être enrayées et où les moteurs de l’activité économique seraient éteints. Certains fondamentaux économiques sont encore porteurs. Il reste encore beaucoup d’épargne, la demande privée est encore solide et la transition énergétique va créer de l’activité. Mais il faudra régler le problème de l’inflation vite et bien car la flambée des prix se poursuit, alors que la BCE s’apprête à relever ses taux. Parallèlement, l’inflation en France a atteint en mai son plus haut niveau depuis trente-sept ans : 5,2 %, selon l’Insee (et 5,8 % selon l’indice harmonisé d’Eurostat). L’économie française est en récession alors que l’inflation n’a pas encore atteint son pic. Pourtant, en partie grâce à l’intervention du gouvernement, la France ne s’en sort pas si mal en comparaison de ses voisins. Son taux d’inflation est le plus bas de la zone euro, après celui de Malte (5,6 %). En moyenne, la hausse des prix dans les pays de la monnaie unique caracole à un plus haut historique de 8,1 % en mai (après 7,4 % en avril). En progression continue depuis novembre 2020, l’inflation dépasse désormais le seuil vertigineux de 20 % en Estonie, plus de 15 % dans les autres pays Baltes, plus de 10 % en Grèce ou aux Pays-Bas, plus de 8 % en Allemagne, Autriche, Irlande, Espagne ou Portugal. Cette flambée des prix est largement tirée par celles du coût de l’énergie (+39 %) et, dans une moindre mesure, de l’alimentation (+7,5 %). Retraitée de ces éléments volatils, l’inflation sous-jacente atteint 3,8 %.
La stratégie de la BCE sera-t-elle adaptée face à une inflation qui ne cesse d’accélérer ? Face à cet emballement, la Banque centrale européenne (BCE), dont la stabilité des prix est le seul mandat officiel, ne risque-t-elle pas d’arriver comme la cavalerie ? Après avoir écarté il y a encore quelques mois toute hausse des taux en 2022, Christine Lagarde a fini par annoncer la fin prochaine de l’expérience des taux négatifs, débutée en 2014. Si les « colombes », qui freinaient des quatre fers à cette normalisation de la politique monétaire semblent s’être ralliées à cette stratégie, le débat fait encore rage à propos du rythme du resserrement à venir en zone euro. Vue l’ampleur de l’inflation, quelques « faucons » de l’institution de Francfort (gouverneurs autrichien et néerlandais) plaident pour une hausse plus nette de 0,5 % (50 points de base) dès juillet. Mais le chef économiste de la BCE (Philip Lane) rappelait que des hausses de 0,25 % seraient plus probables. En revanche, aucune inflexion n’est attendue à l’occasion de la réunion du conseil des gouverneurs le 09 juin prochain, pour ne pas donner l’impression de céder à la panique. Et rien ne dit que la hausse se poursuivra ensuite régulièrement au-delà de 0 %, comme l’anticipent les marchés. Alors que l’objectif de la BCE est une inflation de 2 % à moyen terme, il est autorisé de douter de l’efficacité de ces petits pas lorsque la hausse des prix est quatre fois supérieure. Le début tardif du resserrement de la politique monétaire et le rythme envisagé à partir de juillet, peuvent donner l’impression qu’ils seront dépassés et n’auront qu’assez peu d’impact sur la dynamique inflationniste. Rappelons qu’il faut neuf à douze mois pour que la politique monétaire se transmette à l’économie. De plus, la BCE a beaucoup plus tardé pour agir que la plupart de ses homologues, comme la Banque d’Angleterre, dont le taux directeur est déjà remonté à 1 %, ou la Réserve fédérale américaine, compris entre 0,75 % et 1 %. À travers le monde, les banques centrales ont déjà procédé à plus de soixante hausses de taux soit une offensive mondiale synchronisée sans précédent depuis 2008.
C’est par peur de casser la reprise post-pandémie, puis face aux incertitudes liées à la guerre en Ukraine, que la BCE a temporisé. Pourtant, elle n’est peut-être pas en retard et ce d’autant moins que l’inflation inédite que nous connaissons est essentiellement due à des facteurs exogènes sur lesquels elle a peu de prise et pas à une surchauffe de la demande, contrairement aux États-Unis. Mais elle doit envoyer un signal clair aux marchés et montrer à l’opinion publique qu’elle prend les choses en main ceci afin d’éviter un dérapage des anticipations d’inflation par les ménages et les marchés, qui encouragerait les revendications salariales, elles-mêmes susceptibles à leur tour d’entraîner une spirale incontrôlée de hausse des prix. Pour l’instant, ces anticipations d’inflation restent maîtrisées autour de l’objectif de 2 %, notamment en raison de l’assombrissement des perspectives économiques. Si le ralentissement de l’activité déjà constaté se confirme, l’heure sera moins propice aux augmentations de salaires, ce qui, combiné au dégonflement espéré des tensions énergétiques et industrielles, permettrait d’éviter les effets inflationnistes de « second tour » tant redoutés. D’où la relative prudence de la BCE dans son action. Si nous devions comparer l’action de la BCE par rapport à celle de la Fed, nous dirions que la BCE enlève le pied de l’accélérateur mais n’appuie pas encore sur le frein, contrairement à la Fed, qui elle cherche vraiment à ralentir l’économie pour éviter une sortie de route. Si les marchés anticipent les taux directeurs de la Fed à 3 % fin 2023, pas sûr que la BCE suive le mouvement.
Grande fragilité de l’économie chinoise
Dernièrement, c’est un constat très morose que le premier ministre chinois a dressé sur l’économie de son pays minée par les restrictions anti-Covid. La deuxième économie mondiale rencontre des difficultés plus importantes qu’en 2020 au début de la pandémie mondiale. Depuis mars et plus encore depuis avril, les indicateurs économiques sur l’emploi, la production industrielle, la consommation d’électricité et le transport de marchandises ont connu une baisse marquée. La Chine a publié courant mai ses pires performances économiques depuis deux ans avec une consommation au plus bas et un chômage proche du record absolu (6,1 % en avril). Ce ralentissement économique met en péril l’objectif de croissance d’environ 5,5 % fixé par Pékin dans une année politiquement sensible qui devrait voir le président Xi Jinping être reconduit à la tête du parti communiste chinois (PCC) à l’automne. Or, le parti tire sa principale légitimité de l’augmentation continue du pouvoir d’achat de la population. Le pays est désormais à un moment critique qui déterminera la tendance économique de l’ensemble de l’année. C’est la dernière fenêtre de tir afin de ramener l’économie sur de bons rails afin d’assurer une croissance économique raisonnable au deuxième trimestre et de réduire le taux de chômage. Ce discours intervient alors que la plupart des économistes ont abaissé leurs perspectives de croissance pour 2022 en chine a seulement 3 %. Alors que le pays fait actuellement face à une recrudescence de cas de Covid, la stratégie « zéro Covid » de Pékin impose des mesures particulièrement strictes qui paralysent une large part de la population et de l’activité. Si le confinement décrété en avril semble enfin s’assouplir à Shanghai au bout de deux mois, ses vingt-cinq millions d’habitants restent soumis à des restrictions sévères. Parallèlement, la ville de Pékin renforce à son tour des mesures anti-Covid avec de nombreux commerces ou sites touristiques fermés ou au ralenti. Nous pensons que tant que la Chine s’obstinera à appliquer sa stratégie du « zéro Covid », l’économie mondiale ne parviendra pas à tourner définitivement la page de la crise sanitaire et des conséquences désastreuses qu’elle provoque. Cette position radicale du régime de Pekin entretient et attise continuellement les tensions inflationnistes. Elle interdit aux investisseurs de se projeter plus loin et d’envisager sereinement la croissance future des résultats des entreprises. Le salut pour les marchés actions pourraient venir de la mise au point prochaine de leur propre vaccin ARN. Il y aurait actuellement trois candidats vaccins ARN « chinois » en phase de test (car les chinois refusent d’acheter les vaccins ARN d’origine américaine) ce qui permettrait d’envisager une meilleure couverture et une meilleure efficacité de la vaccination en vue de protéger une population à bout de nerfs à la suite des épouvantables mesures de restriction qu'elle subit. Espérons que d’ici la fin de l’année les scientifiques chinois soient parvenus à fabriquer ce précieux sérum synonyme de fin de la pandémie dans la deuxième économie mondiale. Nul doute qu’une telle annonce constituerait aux yeux des marchés financiers le véritable catalyseur susceptible de permettre aux places boursières de rebondir durablement et de repartir de l’avant à l’instar de la séquence mémorable de novembre 2020 lorsque Pfizer et Moderna ont annoncé au monde leur incroyable découverte.
Quid des relations à moyen long terme avec la Chine ? Va-t-on vers un éloignement profond et durable des relations économiques et commerciales entre la deuxième économie mondiale et les pays occidentaux ? les conséquences d’une séparation seraient considérables sur le front géopolitique mais aussi industriel. Nous pouvons déjà nous interroger sur l’impact inflationniste à long terme d’un découplage de la Chine à l’égard du monde démocratique. La désinflation depuis au moins une génération doit en effet beaucoup à l’intégration de la Chine dans l’économie mondiale. Si les Etats-Unis et l’Europe, deux régions riches mais vieillissantes décident de réduire leur dépendance économique à l’égard de l’empire du Milieu, c’est tout le modèle de croissance occidental qu’il faudra réinventer.
A suivre dans les prochaines semaines :
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