Quatre ans après son adoption, la mission parlementaire, composée de 19 députés (membres de la commission des lois, toutes tendances politiques confondues), livre un bilan consternant. Ils jugent qu'au final, la loi NOTRe a entraîné une organisation territoriale plus complexe et une perte de proximité pour les citoyens. La mission a travaillé dans le cadre du règlement de l'Assemblée nationale stipulant qu'un rapport d'évaluation d'une loi peut être effectué trois ans après l'entrée en vigueur de celle-ci.
RENFORCEMENT DE L’ÉLOIGNEMENT DES CITOYENS
Dès le départ, la loi NOTRe, sensée aboutir à un « big bang territorial » et conduite à marche forcée, a souffert d'un important problème de méthode, estiment les membres de la commission. Elle n'a selon eux pas bénéficié d'une véritable étude d'impact et s'est inscrite dès le départ dans un cadre rigide et contraignant. Ainsi, non seulement la loi NOTRe n'aurait pas atteint ses objectifs initiaux mais elle aurait souvent produit des effets contraires aux intentions du législateur. Principal exemple : la simplification du « mille-feuille » territorial n'a pas eu lieu, ni la clarification des compétences entre les catégories de collectivités. La loi s'est construite, dénoncent les parlementaires, sur le postulat erroné du « big is beautiful » pour augmenter la taille des structures territoriales. Or, ce principe est déconnecté de la recherche d'un « territoire pertinent » qui lui repose sur une logique géographique, ou d'identité (histoire…). En outre, en augmentant la taille de certaines collectivités ou groupements (les intercommunalités et les régions) et leurs compétences, la loi a renforcé l'éloignement des citoyens de la mise en œuvre des politiques publiques qui les concernent. Les parlementaires estiment ainsi que la loi a été vécue comme une expérience traumatisante par de nombreux élus locaux.
PAS D'ÉCONOMIES
La loi NOTRe avait pour objectif de réduire les dépenses publiques en réalisant des économies d'échelles. L'augmentation du seuil de population minimum des intercommunalités de 5 000 à 15 000 habitants devait mécaniquement réduire fortement leur nombre. Le ministre de l'époque parlait d'économies pouvant atteindre 12 à 25 milliards d'euros annuels. Un chiffre qui ne s'est absolument pas vérifié.
La mission dénonce également les revirements successifs du gouvernement de l'époque sur plusieurs points, notamment celle de la clause générale de compétence des régions et des départements.
La loi NOTRe avait en outre fixé un objectif ambitieux de réduction du nombre de syndicats (mixtes ou intercommunaux), mais il est apparu que ceux-ci gardaient souvent leur utilité pour l'exercice de certaines compétences. Après ce constat très sévère, le rapport livre des propositions pour améliorer la situation. Certaines sont déjà mises en œuvre dans la loi Engagement et proximité du 27 décembre 2019. D'autres devraient pouvoir entrer en application dans le projet de loi 3D (décentralisation, différenciation et déconcentration) sur lequel nous reviendrons prochainement.
Pour en savoir plus
Rapport d'information de la Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'information générale de la République (n° 2539 du 18 décembre 2019)
© Philippe Houdart – Uni-Médias – Février 2020
Article à caractère informatif et publicitaire.