Commerces non alimentaires, restauration, industrie automobile, transports aériens, tourisme, culture... : l’épidémie de coronavirus a provoqué la paralysie de nombreux secteurs d’activités mais l’alimentation a tenu bon. Si l’on se place du point de vue des consommateurs, en dépit de quelques ruptures de stocks liées à des achats effrénés, les étals des grandes surfaces et des magasins de proximité sont demeurés bien approvisionnés depuis le premier jour du confinement décrété le 17 mars. Le risque n’était pourtant pas neutre, étant donné le caractère aussi brutal qu’inédit de la situation. Au plan alimentaire, l’épidémie a ainsi imposé une diète totale à la restauration hors domicile, collective et commerciale, laquelle assure 25% de nos repas, selon l’étude des modes de consommation Inca 3 menée par l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses). Mais la restauration à domicile a pu compter sur des approvisionnements sans faille, en magasin, en exploitation, en drive ou encore via des livraisons, sans oublier internet.
UNE INFLATION CONTENUE
Du côté des étiquettes, les instituts statistiques spécialisés dans l’analyse des prix n’ont pas constaté de dérapage en mars : - 0,02% sur un mois selon l’Institut de recherche et d'innovation (IRI), - 0,08% sur un an selon Nielsen. Il faut dire que certains distributeurs s’étaient engagés à bloquer les prix. Cependant, l’Association nationale des industries alimentaires a fait état d’une hausse de ses coûts comprise entre 3% et 16% du fait l’augmentation des prix des matières premières, d’une moindre productivité, des achats d’équipements de protection des salariés et des coûts de transport plus élevés. De son côté, l’association de consommateurs Que Choisir a noté une hausse moyenne de 2,5% des produits de première nécessité en 4ème semaine de confinement (6 à 11 avril), comparativement à la période du 2 au 6 mars. Parmi les plus fortes hausses figuraient la farine (+5%), le lait (+ 4%), les œufs (+ 2%), le riz (+ 2%) et le jambon (+ 1%). Toujours sur ces périodes, l’association a fait par ailleurs état d’une hausse moyenne des prix des fruits et légumes de 9%, en grande partie due à la prédilection pour les produits français, aux coûts de production plus élevés, ainsi qu’à une plus forte proportion d’achats dans les magasins de proximité, aux prix supérieurs à ceux pratiqués en grande distribution.
DES FILIÈRES AFFAIBLIES
Quant à la ferme France, elle est restée pleinement opérationnelle. Coopératives et négoces ont approvisionné les exploitations en semences, engrais et produits phytosanitaires. Les distributeurs de matériels agricoles ont assuré la fourniture de pièces détachées et les dépannages. Les vétérinaires sont restés opérationnels, au même titre que les fournisseurs de services (conseil, banque...). Cependant, de nombreuses exploitations ont subi de plein fouet la crise, à commencer par les entreprises horticoles, interdites de débouchés car considérées comme non essentielles, qui plus est au printemps, c’est-à-dire au pire moment. Le secteur équin est également mis à mal, avec l’interdiction d’ouverture des centres équestres. La pêche a vu aussi bon nombre de ses débouchés se fermer. La viticulture fait quant à elle les frais de la fermeture des bars et restaurants et va subir, à plus long terme, la contraction des marchés export. Il en va de même pour la filière laitière, très dépendante de l’export, ainsi que des productions de fromages appellation d’origine protégée (AOP), desservies par la fermeture des rayons à la coupe. Dans le secteur de la viande, si l’agneau de Pâques a pu sauver son débouché, là encore grâce à une forme de patriotisme alimentaire, la volaille a subi de plein fouet la perte du débouché en restauration collective, tandis que le bœuf, le veau et le porc enregistraient des baisses de cours. Sur les filières courtes, la fermeture des marchés de plein vent et de la restauration hors domicile a pénalisé de nombreuses exploitations, pas toujours comblée par le développement des ventes à la ferme, en drive ou encore via internet. Il y a enfin les exploitants qui, faute de saisonniers étrangers, n’ont pas pu récolter leurs fraises ou leurs asperges. Au final, beaucoup de perdants mais pas véritablement de gagnants.
© Raphaël Lecocq – Uni-Médias – Mai 2020
Article à caractère informatif et publicitaire.