Jusqu’à quatre milliards d’euros : tel pourrait être le préjudice engendré par les séquences de gel qui ont affecté les trois quarts du territoire métropolitain en avril dernier. La viticulture pourrait à elle seule payer un tribut de deux milliards d’euros : les productions arboricoles ont été, par ailleurs, très affectées. Cet épisode d’une ampleur exceptionnelle, amplifié par des températures anormalement élevées précédant la vague de froid, n’est pas étranger au changement climatique à l’œuvre.
Face à un ennemi comme le gel, et notamment en cultures pérennes, il ne faudra pas trop compter sur les parades agronomiques telles qu’elles peuvent se dessiner en grandes cultures avec la sélection variétale et l’évolution des systèmes culturaux. Les exploitants peuvent en revanche miser sur certains outils tels que les bougies, les tours à vent, les systèmes de nébulisation ou encore sur la couverture par aspersion.
Le ministère de l’Agriculture avait été prévenant. Dans le cadre de Plan de relance, il avait alloué une enveloppe 70 millions d’euros aux matériels contribuant à s’adapter au changement climatique et à améliorer la résilience des exploitations face aux aléas tels que le gel, la grêle, la sécheresse et le vent. Suite au gel, le gouvernement a doublé l’enveloppe. Malheureusement, par son intensité (jusqu’à - 7°C), sa durée et sa polymorphie (gelées blanches et noires), le gel a aussi montré les limites de bon nombre de moyens de lutte, en dehors peut-être de l’aspersion.
LES SOLUTIONS ASSURANTIELLES
Quant aux systèmes assurantiels, qu’il s’agisse du régime des calamités agricoles désormais obsolète et de l’assurance multirisque climatique sous-dimensionnée face aux défis climatiques, ils ont montré leurs limites.
Là encore, le gouvernement avait anticipé en lançant le chantier de la rénovation des systèmes assurantiels publics et privés. Un rapport parlementaire propose de renforcer la pénétration des assurances privées, en abaissant le seuil et le niveau de franchise à 20%, tout en augmentant la part subventionnée à 70%, soit le taux maximum permis par le règlement européen dit « omnibus » (adopté en 2018 pour réviser les règles financières de l'Union européenne afin de les rendre plus simples et davantage axées sur les résultats).
Le régime des calamités s’appliquerait à toutes les cultures sans discernement et à partir d’une perte de récolte de 50%, ce qui le positionnerait sur des évènements exceptionnels. Mais comme ces deux mécanismes ne suffiront pas, un Fonds de solidarité pour l’agriculture, de l’ordre de 400 à 500 millions d’euros, serait créé. Cette refonte s’inscrit dans le Varenne agricole de l’eau et de l’adaptation au changement climatique, ouvert depuis le 28 mai dernier. On y explorera, outre les leviers d’adaptation de l’agriculture au changement climatique, les conditions d’accès et de partage à la ressource en eau.